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roi de l’affaire de l’assiente[1], des nègres pour les Indes espagnoles… Sa Majesté m’a permis de la suivre et de former une Compagnie capable de la soutenir et d’en tirer pour le royaume tous les avantages qu’on peut espérer. » Et il lui explique qu’elle sera subrogée à la Compagnie de Guinée. Celle-ci jouit de l’exemption de la moitié des droits pour les marchandises qu’elle rapporte des îles et de l’entrepôt pour les marchandises qu’elle est obligée de tirer des pays étrangers. On demande les mêmes privilèges pour les produits des Indes occidentales, à savoir cochenille, indigo, cuirs, cacao, bois de teinture. Ces « grâces » ne lui paraissent pas devoir faire tort aux fermes. Du reste, il a songé à dédommager les fermiers en engageant la Compagnie de l’Assiente à remettre la meilleure partie du commerce des îles aux marchands des principales villes du royaume par des permissions particulières, « et pour lors on la réduira au seul vaisseau qui ira en Guinée, ce qui est une restriction considérable, parce que le chargement d’un vaisseau en nègres produit celui de plus de trois en sucre[2] ». Un traité fut donc conclu entre les rois de France et d’Espagne et le sieur Ducasse pour la fourniture des nègres dans les Indes espagnoles, et la Compagnie de l’Assiente fut constituée le 27 août 1701[3]. En vertu de l’article 1er, elle devra introduire aux Indes en dix ans (du 1er mai 1702 au 1er mai 1712) 48.000 noirs pièces d’Inde, « lesquels ne seront point tirés du pays de Guinée qu’on appelle Minas et Cap Vert, attendu que les nègres de ces pays ne sont pas propres pour les Indes occidentales ». On exigeait, sans doute, des nègres d’Angola, considérés comme supérieurs. Ce

  1. Assiente, ou plutôt assiento, indique, d’une manière générale, un contrat passé pour fournitures. Puis, historiquement, il a servi à désigner d’une manière spéciale les traités conclus par l’Espagne en vue de permettre le monopole de la traite des nègres dans ses colonies d’Amérique avec la Flandre en 1517, avec Gênes en 1580, avec le Portugal en 1696, avec la Compagnie française de Guinée en 1701, avec l’Angleterre en 1713.
  2. Arch. Col., B, 24, p. 150.
  3. Ib., F, 142. Traduction du traité de l’Assiente de la langue espagnole en langue française, 27 août 1701. Le traité contient 34 articles.