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de Guinée, puisque, outre qu’on lui paiera ses droits, si elle en envoyait encore 200, elle n’en trouverait pas moins le débit[1] ». Et de Ferolles n’a pas été blâmé. Il ne faut pas oublier que la guerre rend les arrivages de plus en plus difficiles. On déroge donc aux défenses portées précédemment. Par exemple, le 18 juin 1691, la permission est exceptionnellement accordée aux habitants de la Grenade « d’aller traiter des nègres avec les sauvages de la terre ferme des Espagnols, dans le temps qu’on n’attendra plus aucun vaisseau des Compagnies de Guinée et de Sénégal[2] ». On tâche d’en enlever aux ennemis. Ceux qui proviendront des prises devront être distribués d’abord aux colons de Saint-Christophe, Marie-Galante et la Guadeloupe, « à proportion de leurs familles ou des biens qu’ils avaient lorsqu’ils ont été dégradés, » puis aux petits habitants de la Grenade et de Sainte-Croix, et enfin à ceux de la Martinique[3]. Le roi recommande au comte de Blenac de ruiner les établissements des Anglais ; il distribuera leurs nègres à ses administrés et, si le nombre passait 1.000, le reste serait vendu au profit de Sa Majesté[4]. Enfin, le 27 août 1692, le Ministre écrit à Ducasse, gouverneur de Saint-Domingue : « Comme il ne faut point espérer de pouvoir obliger les compagnies du Sénégal[5] et de Guinée à porter une quantité suffisante de nègres à Saint-Domingue, le roi consent que vous permettiez aux habitants d’en tirer de tous les endroits d’où ils pourront en avoir ; mais vous observerez de vous informer des moyens

  1. Arch. Col., F, 22. Lettre au Ministre, 3 août 1687.
  2. Arch. Col., F, 249, p. 489. Extrait d’un Mémoire du roi.
  3. Arch. Col., B, 14, p. 96. Ordonnance du 24 septembre 1691.
  4. Arch. Col., B, 14, p. 112. Lettre du 5 novembre 1691 ; — p. 124, Instructions analogues le 23 novembre ; — p. 125, même jour, lettre identique à de Goimpy.
  5. Ses affaires étaient si peu brillantes que, dès le 28 juin 1692, un arrêt du Conseil d’État lui permit « de faire la vente dudit Sénégal, Gorée et lieux en dépendans, justice, seigneurie et privilège du commerce, à ceux qui se présentent pour les acquérir », alors qu’il restait encore dix-neuf ans à courir. Arch. Col., G6, carton 2.