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exceptionnels, tels que « la découverte d’une conspiration, celle d’un poison inconnu, avec l’indication des coupables et des preuves ; la dénonciation d’un repaire, d’une troupe d’esclaves obstinés dans leur défection ; la découverte d’un parti ennemi ; la capture ou la destruction d’un général ennemi dans une affaire ; la conservation de la vie d’un blanc dans un danger évident » ; et, en outre, pour certains services privés déterminés, comme « la nourriture du maître ou de trois de ses enfants sevrés par ses ordres ; la maternité de six enfants vivants, dont le moins agirait atteint sept années ; trente années de travail au jardin ou de service domestique, sans marronage ; une industrie, une économie, un attachement ayant contribué avec distinction à la conservation et à la fortune du maître… » Il traite ensuite de la nécessité d’assurer la subsistance de l’affranchi. Il ne paraît pas y avoir jamais eu de règlement spécial à ce sujet. Mais, en fait, les administrateurs exigeaient, la plupart du temps, que les maîtres prissent un engagement en ce sens. Le roi prescrit, le 20 mars 1784, à ceux de la Guyane[1], de n’imposer une pension que si l’affranchi a cinquante ans ou s’il est affligé ou menacé d’infirmité. En aucun cas, cette pension ne pourra dépasser 600 livres ni être au-dessous de 400 livres argent de France. Aussi beaucoup de maîtres, pour éviter de contracter pareille obligation, laissaient-ils simplement tel ou tel de leurs esclaves en liberté, sans faire régulariser sa situation. « Le libre de fait, — écrit à ce sujet M. Schœlcher[2], — dont le propriétaire était mort, le patronné qui avait perdu son patron, étaient tenus pour fugitifs, épaves, s’ils ne pouvaient montrer un titre légal d’affranchissement, et appartenaient au roi qui pouvait les faire vendre au profit de l’État. » Ainsi, en 1705[3], une négresse au service d’une demoiselle La Pallu, ayant réclamé sa liberté,

  1. Arch. Col., F, 72. Instructions au sieur de Clugny, gouverneur, et au sieur Foulquier, intendant.
  2. Colonies françaises, p. 306.
  3. Arch. Col., F, 250, p.301, 8 avril.