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pour la plupart d’entre eux qui se la donnent volontairement ». De plus, mettre les esclaves à la chaîne est un moyen de les conserver à la colonie. C’est une raison d’utilité et non d’humanité qui prévaut. Le 3 janvier 1764, les administrateurs de la Martinique rendent une ordonnance[1] portant également commutation de la peine de mort pour troisième marronage et des galères en celle des travaux à la chaîne. Il faut donc croire que la lettre du roi citée plus haut ne paraissait pas suffisante comme texte législatif ; c’est sans doute parce qu’elle n’était pas accompagnée d’une ordonnance. Mais il y a lieu de remarquer que très souvent il est difficile de savoir au juste ce qui a force de loi aux colonies. — Le 23 mars 1764, la réglementation sur ce point est encore modifiée par une ordonnance de l’intendant Clugny, de la Martinique[2]. Il rappelle l’article 26 du règlement du 31 juillet 1743, suivant lequel les nègres marrons non réclamés dans le mois devaient être attachés à la chaîne. Depuis, on avait décidé — le 26 octobre 1746 — qu’ils seraient vendus à la barre des sièges royaux, mais que les maîtres pourraient les reprendre pendant un an et un jour ou en réclamer le prix pendant cinq ans. Or cette manière de procéder a suscité de nombreuses difficultés. En conséquence, l’intendant décide que les marrons seront mis à la chaîne immédiatement après leur incarcération (art. 1) ; les maîtres auront le droit de les réclamer en tout temps, « en payant les frais de capture et un mois de nourriture à la geôle ». — Au Cap, pour faciliter les réclamations, on fait insérer, à dater du 8 février 1764[3], dans la Gazette (récemment créée), la liste des nègres marrons, en spécifiant, autant que possible, le nom, la nation, l’étampe et l’âge apparent de chaque nègre. — Mais il se produit toutes sortes de confusions au sujet de la destination de ces nègres

  1. Arch. Col., F, 260, p. 7.
  2. Moreau de Saint-Méry, IV, 717.
  3. Id., ib., 706. Lettre de l’intendant aux officiers de la juridiction du Cap.