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autres, les ont excités à commettre plus d’excès ». Ils ont, en particulier, enlevé « l’enfant du sieur Vouche, qu’ils ont tué et mangé avec tous les traits marqués de la joie dont ils usent dans leurs pays dans de pareils sacrifices, étant la plupart nègres mondongues réputés anthropophages[1] ». La relation indique nombre d’autres condamnations qui ont suivi. Cette sorte de procès monstre se continua jusqu’en novembre 1738, à la suite de révélations faites par les accusés mis à la question[2].

Vers cette époque, il semble qu’il y ait partout une recrudescence du marronage. Le Conseil de Léogane promulgue le_17 janvier 1739, un règlement concernant la maréchaussée[3], dont plusieurs articles nous intéressent particulièrement. Outre les chasses extraordinaires, les habitants seront tenus d’en faire « une autre, qui sera appelée l’ordinaire, par chaque semaine, où le prévôt et l’exempt marcheront et commanderont alternativement avec moitié de la troupe, pour suivre les nègres fugitifs dans les bois, montagnes et autres lieux de leurs départements, laquelle course ne pourra durer moins de trois jours, et sera, attendu leurs appointements, par eux faite sans aucun salaire ni récompense que celle qui leur reviendra des captures qu’ils pourront faire, suivant la taxe qui sera réglée ci-après… » (art. 19). — « Lorsqu’il sera ordonné auxdits prévôts, exempts, brigadiers et archers de marcher à la requête d’un habitant pour courir sur les nègres esclaves qui seront partis attroupés, il leur sera payé par ledit habitant, après leur expédition, par chaque jour, savoir : au prévôt la somme de 40 sols, à l’exempt, celle de 30 sols, et à chacun des brigadiers et

  1. Arch. Col., F, 231, p. 263. Cf. aussi F, 134, p. 8, Lettre de Mont-Saint-Rémy, du 4 février 1738, relative à la même affaire ; il est question d’un enfant de six ans « immolé aux faux dieux et mangé » et de nègres et négresses mangés également ou enterrés vifs par les marrons.
  2. Ib., F, 231, p. 279, Arrêt du Conseil supérieur, du 23 janvier 1739, confirmant les sentences contre lesdits nègres.
  3. Moreau de Saint-Méry, III, 551.