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le nègre Petit Jean est condamné à avoir la jambe gauche coupée en présence de tous les autres nègres des habitations voisines, et le nègre Jacques à avoir le jarret coupé au-dessous du genou et être marqué sur le front de la fleur de lys. Mais, suivant Dessalles, cette décision paraît avoir été sans exécution ; de plus le Conseil, n’ayant pas le droit d’ordonner la peine de mort contre les marrons, fit un règlement[1], d’après lequel les nègres marrons depuis quinze jours jusqu’à deux mois auraient le fouet et la fleur de lys, de quatre à six mois, le jarret coupé, et, au-dessus, les jambes. Il semble difficile d’admettre, avec Dessalles, que le Conseil n’avait pas le droit de condamner à mort, car nous trouvons, à la date du 14 novembre 1678, une lettre de Blenac au Ministre[2] disant : « J’ai fait finir les détachements des habitants contre les nègres marrons, attendu que les chefs sont tués, noyés ou roués, et quantité d’autres, et qu’il en reste peu dans les bois. » La copie de l’ordre envoyé à cet effet au major le 2 novembre se trouve aux Archives Coloniales[3]. Le 17 juillet 1679, le Conseil de la Martinique condamne quelques nègres accusés d’avoir voulu s’évader hors de l’île, les hommes à avoir une jambe coupée, et les femmes le nez, les uns et les autres à être marqués de la fleur de lys sur le front. Le 3 septembre 1681[4], il est obligé de rendre un autre arrêt général contre les marrons. « Si ces désordres continuaient, on serait exposé aux révoltes, dont les exemples encore récents donnent sujet d’en craindre de nouvelles. » Aussi, comme mesure de précaution, devait-t-on attacher les canots avec une chaîne de fer, et, de plus, faire des détachements d’habitants.

Comme on vient de le voir, il n’y a pas eu de jurisprudence fixe jusqu’au Code Noir. L’article 38 est ainsi conçu :

  1. Moreau de Saint-Méry, I, 306.
  2. Arch. Col., C8, II.
  3. Ib., F, 248, p. 385.
  4. Ib., ib., p. 651.