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Ainsi le Conseil supérieur de la Martinique, se fondant sur le Code Noir, réforme en appel, le 5 novembre 1686[1], une sentence du juge ordinaire au sujet de nègres réputés immeubles au moment de la célébration d’un mariage. Mais qu’allait-on faire au sujet des contrats de mariage ayant précédé l’enregistrement du Code Noir ? C’est ce que demande au Ministre l’intendant Dumaitz de Goimpy, par lettre du 18 décembre 1686[2]. Il fait observer que, dans ce cas, « il y aurait plusieurs enfants ruinés, le plus beau bien de la famille consistant en des nègres qu’ils seraient obligés de partager avec leurs beaux-pères, qui, la plupart, n’en avaient aucun avant de se marier ». Dans une autre lettre du même jour[3], il cite l’avis de Le Prestre, jurisconsulte fameux, d’après lequel (ch. lv, p. 174) une ordonnance n’a de valeur qu’après qu’elle a été enregistrée, à moins d’une disposition spéciale, qui n’existe pas dans celle de mars 1685. Or, aux Antilles, les seconds mariages sont fréquents. Beaucoup de conjoints n’ont nullement entendu faire entrer les esclaves dans la communauté. Ce serait un avantage indirect qu’une femme ferait à son mari au préjudice des enfants du premier lit, ce qui est défendu positivement par l’édit des secondes noces. Cependant le roi fait répondre en marge qu’il faut remonter avant l’enregistrement, toutefois « à condition que le partage n’ait pas déjà été fait ». Alors, à propos d’un autre cas particulier, les membres du Conseil supérieur écrivent au Ministre, le 16 juillet 1687[4] : « Pour les noirs, il est nécessaire de remonter à l’année 1673, dans laquelle les parties contractèrent mariage, auquel temps ils ont toujours été partagés conjointement avec la terre comme immeubles. »

Le point en litige fut tranché par un arrêt du Conseil d’État, du

  1. Arch. Col., F, 250, p. 87.
  2. Arch. Col., C8, 4.
  3. Ib., ib.
  4. Ib., ib.