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contribua surtout à développer la traite des nègres, commencée dès le milieu du xve siècle[1].

Les conquérants s’occupèrent d’abord d’exploiter les mines ; mais ils s’aperçurent bien vite que les indigènes, assujettis à un travail excessif, ne résistaient pas suffisamment. Alors ils eurent en même temps recours à des engagés. Ce système allait être imité par les Français aux Antilles, et nous verrons combien il est fâcheux qu’on n’y ait pas persévéré davantage. Mais ces travailleurs libres ne contractaient que des engagements temporaires ; de plus, comme ils étaient généralement misérables, il était assez difficile de les acclimater ; les profits étaient diminués par leur salaire : enfin, on trouva bientôt que leur nombre devenait insuffisant, dès qu’on se mit à cultiver la surface du sol, en vue d’en exporter les produits.

Comme on l’a dit pendant longtemps, comme on l’écrit même encore, ce serait Las Casas qui, désireux d’adoucir les misères des Indiens et préoccupé de convertir des idolâtres, aurait donné, le premier, l’idée d’employer des nègres d’Afrique. Cette question a prêté à de nombreuses et longues discussions, qu’il n’y a pas lieu de reprendre ici. Avec Llorente et De Humboldt[2] nous croyons que Las Casas a simple-

  1. Azurara, qui nous a laissé le plus ancien récit des expéditions dirigées sur les côtes occidentales d’Afrique, fixe à l’année 1444 les commencements de la traite africaine. Voir Chronica do descobrimento e conquista de Guiné, etc. ; — et Ferdinand Denis, Chroniques chevaleresques de l’Espagne et du Portugal. Paris. 1839, 2vol. in-8. II. 49 : Fragment de la chronique d’Azurara intitulé : « Le premier jour de la traite à Lagos [8 août 1444]. » — D’après De Humboldt, Examen critique de l’histoire de la géographie du Nouveau Continent, etc. vol. in-8. III, 305 : « Ortiz de Zuniga, Annales de Sevilla*, lib. XII, n° 10, a prouvé que des noirs avaient déjà été amenés à Séville sous le règne du roi Henri III de Castille. par conséquent avant 1406. » Mais ce ne serait là qu’un fait exceptionnel.

    * Le titre complet est:Annales eclesiaticos y seculares de la muy noble y muy leal ciudad de Sevilla. Madrid, 1677, in-4o. Cf. p. 365.

  2. Cf. J.-A. Llorente, Œuvres complètes de Las Casas, I, 268, et surtout l’Appendice placé à la fin du second volume. — De Humboldt, op. cit., III, 305, note où est discuté le problème avec textes à l’appui. — Voir aussi Grégoire, Apologie de Las Casas, dans Mémoires de l’Institut, Sciences morales et