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d’une adresse remarquable dans les jeux de bâton, et l’on en voyait se porter des coups pendant un quart d’heure sans pouvoir se toucher. Cet exercice était désigné sous le nom de Jan-coulibé, à la Martinique[1].

Mais il est certain que les colons tâchaient de restreindre le plus possible ces divertissements, qui avaient pour eux leur danger.



V

Nous en aurons fini avec le chapitre des obligations légales des maîtres à l’égard de leurs esclaves, quand nous aurons mentionné l’article 27 du Code Noir. « Les esclaves infirmes par vieillesse, maladie ou autrement, soit que la maladie soit incurable ou non, seront nourris et entretenus par leurs maîtres, et, en cas qu’ils les eussent abandonnés, lesdits esclaves seront adjugés à l’hôpital, auquel les maîtres seront condamnés de payer 6 sols par chacun jour pour la nourriture de chacun esclave. » Nous ne sommes plus, à vrai dire, au temps où l’austère Caton faisait vendre ses vieux esclaves pour ne pas nourrir de bouches inutiles[2]. Par la suite, le droit romain affranchit l’esclave abandonné de son maître[3]. Mais quel triste privilège que celui de la liberté donnée dans ces conditions, et qui le réduit presque à mourir de faim ! Dans le Code Noir, nous constatons évidemment l’influence des progrès de la civilisation, des idées chrétiennes. Mais nous en sommes réduits à nous demander encore ici comment ces prescriptions légales étaient observées dans la réalité. Nous n’avons pu trouver qu’un arrêt du Conseil-Supérieur du Cap, du 15 juin 1744[4], condamnant un maître, qui

  1. Arch. Col., F, 133, p. 188.
  2. Plutarque, Vie de Caton, VI.
  3. Digeste, XXXX, VIII, 2 (Corpus, édit. Mommsen, t. I, 635).
  4. Arch. Col., F, 90.