Page:Peytraud - L'esclavage aux Antilles françaises avant 1789, 1897.djvu/251

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

chausses ni de souliers pour les uns ni pour les autres. Les enfants restaient complètement nus jusqu’à quatre ou cinq ans. Le dimanche, les hommes portaient une chemise et un caleçon de couleur, avec un chapeau ; les femmes, une chemise et une jupe de toile blanche ou de serge rouge ou bleue.

Le Code Noir dit simplement (art. 25) : « Seront tenus les maîtres de fournir à chaque esclave, par chacun an, deux habits de toile ou quatre aunes de toile, au gré des maîtres. »

Puis, on ne semble plus s’être occupé de la question. Labat[1] écrit que les hommes portent un caleçon et une casaque, et les femmes, une jupe et une casaque. Les maîtres raisonnables se conforment aux prescriptions du Code Noir et fournissent deux rechanges complets par an. Mais il y en a qui ne donnent qu’un habit pour toute l’année ou ne renouvellent que les caleçons et les jupes ; d’autres profitent de la facilité de ne donner que de la toile et du fil.

Nous Voyons dans Dessalles (III, 299) que, de son temps, l’obligation relative aux vêtements n’est presque jamais exécutée, sous prétexte qu’elle serait trop coûteuse. Mais « le nègre industrieux sait bien se procurer, et au delà, les commodités de l’existence. » Comment s’arrangeait-il, puisque, d’après les règlements, l’esclave ne pouvait rien acquérir, rien posséder en propre (Cf. chap. v, au sujet du pécule) ? C’est que, de même que pour les mœurs, les prescriptions légales avaient beau être des plus sévères, presque toujours elles étaient enfreintes ; de même, et par un heureux effet ici, la rigueur de la loi était tempérée dans la pratique par la tolérance et parfois même la générosité des maîtres. Ou bien les esclaves profitaient du peu de temps qui leur était laissé libre pour cultiver des légumes et élever de la volaille, ainsi que nous l’avons indiqué, ou bien ils allaient soit à la chasse, soit à la pêche, et, si c’était pour le compte de leur maître, celui-ci était dans l’usage de leur laisser quelque

  1. Nouveau voyage aux isles… IV, 202.