Page:Peytraud - L'esclavage aux Antilles françaises avant 1789, 1897.djvu/204

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

du libre. Le premier titre traite ensuite de l’instruction : Il faut enseigner le catéchisme aux nègres par des procédés en rapport avec l’état de leur esprit, d’une manière concrète, en usant de comparaisons, d’images, etc. Il est bon de s’intéresser à eux, pour leur enseigner à obéir et à bien vivre. « Chacun ne peut se sanctifier qu’en remplissant les devoirs de son état dans la condition et la situation où la Providence l’a placé. » Il est question, en second lieu, des moyens d’instruction. On divisera les nègres en trois classes, comprenant ceux qui sont : 1° baptisés, instruits et mariés ; — 2° baptisés et célibataires ; — 3° les catéchumènes. Les meilleurs de la première classe seront choisis pour surveiller les autres à l’église ; ils seront habillés d’une soutane et d’un surplis, car il s’agit d’exciter leur émulation, de frapper et flatter leur imagination. Enfin vient la discipline : La religion sera le meilleur moyen d’empêcher tout marronage, empoisonnement, avortement. Les coupables qui seront dénoncés par leurs maîtres seront placés sur le seuil du portail de l’église, à genoux, et astreints à une pénitence publique ; ils recevront l’absolution le jour de Pâques, s’ils en ont été jugés dignes.

On trouve, d’ailleurs, à peu près constamment la trace des préoccupations officielles qu’inspirait le salut des noirs. Par exemple, un arrêt du Conseil de la Martinique[1], du 12 mars 1718, ajourne l’exécution d’un nègre condamné à mort, à cause de l’ivresse du patient, « pour empêcher la perte du salut de l’âme dudit ». Dans un arrêt en règlement du Conseil du Cap, des 12 septembre 1740 et 6 mai 1741[2], nous relevons les prescriptions suivantes : Article premier : Les esclaves prisonniers seront tenus d’assister tous les jours à la prière du matin et du soir, à peine de trois jours de cachot. — Art. 8. Il est enjoint aux anciens prisonniers et autres de dénoncer ceux de la chambre ou cachot qui auraient juré le S. nom de Dieu. — Dans le Mémoire du 7 mars 1777, que nous avons cité plus

  1. Arch. Col., F, 251, p. 783.
  2. Moreau de Saint-Méry, III, 625.