Page:Peytraud - L'esclavage aux Antilles françaises avant 1789, 1897.djvu/155

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’intendant et au gouverneur pour chacun des nègres qu’ils ne prendraient pas, cela s’est fait ainsi sans la moindre contrainte et comme la suite d’un usage ancien… Il faut convenir qu’il y a des généraux qui ont poussé les choses jusqu’à prendre 20 nègres sur une cargaison… En tout cas, les nègres sont payés 300 livres, alors qu’ils ne reviennent pas au marchand à 120… C’est la seule ressource qui m’aide à vivre. Mes appointements me sont dus depuis six années. »

À chaque instant, cette question suscite des difficultés et des interprétations particulières. Ainsi le roi, dès 1721, abolit pour la deuxième fois « le prétendu droit[1] ». Mais, en revanche, il autorise De Pas de Feuquières et Blondel à accepter du Conseil des Indes une somme annuelle de 10.000 francs « par rapport au commerce exclusif des nègres dont jouit la Compagnie[2] ». Le droit de 2 % ne tarda pas à être rétabli. En effet, une ordonnance royale du 28 décembre 1723[3] décide que les intéressés n’en jouiront pas pendant leur absence des îles ; suivant une dépêche du 17 juillet 1732[4], il est prescrit de le percevoir d’après l’évaluation des cargaisons en pièces d’Inde ; il n’est dû que sur les nègres traités[5]. Une lettre ministérielle du 3 août 1747[6] rappelle encore que ce n’est qu’une tolérance de la part du roi et que, s’il a été fixé, c’est pour qu’il ne soit dépassé en aucun cas. Enfin, le roi écrit, le 28 juillet 1759, à MM. Bart et Elias[7] : « Cette perception a d’ailleurs donné lieu à tant d’abus et de représentations qu’indépendamment de la charge qu’elle fait suppor-

  1. Arch. Col., B, 44, p. 347. Lettre ministérielle au comte de Moyencourt, 3 octobre 1721, et F, 69 : Mémoire du Roi, du 4 janvier 1723, à l’Intendant Blondel de Jouvancourt.
  2. Arch. Col., C8, 32. Lettre du 23 septembre 1723.
  3. Moreau de Saint-Méry, Loix et Constitutions, etc., III, 79.
  4. Arch. Col., B, 56, Îles-du-Vent, p. 370. À MM. de Champagny et d’Orgeville.
  5. Arch. Col., B. 59, Îles-du-Vent, p. 238. Aux mêmes, du 18 juillet 1733. — Cf. aussi B, 68, Îles-sous-le-Vent, p. 100. Lettre ministérielle à M. de Larnage, 12 décembre 1739, sur les plaintes réitérées des négriers.
  6. Arch. Col., F, 238, p. 305.
  7. Arch. Col., B, 109, p. 45.