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majeure partie de leurs nègres, de vendre en gros ceux de rebut ».

Il se produisait encore cette autre difficulté : c’est que les habitants qui se trouvaient éloignés des ports où arrivaient les navires n’avaient pas toujours la ressource d’acheter des nègres à temps. Aussi, dans une pétition qu’ils adressent aux administrateurs, le 19 août 1670[1], ceux de la Martinique demandent, à l’article 24 : « Que de tous les nègres qui viendront pour le compte de nos seigneurs de la Compagnie il soit fait un lot pour chaque quartier ; pour les nègres qui viendront par les navires particuliers, nosdits seigneurs sont priés de nous procurer la même chose, vu que c’est l’intérêt général que les quartiers éloignés soient peuplés. » Qu’advint-il de cette demande ? Nous n’en savons rien. Ce n’est que près d’un siècle après que nous trouvons une ordonnance du général et intendant de la Martinique prescrivant cette vente des nègres de traite dans les diverses parties de l’île[2].

Aussitôt après la vente, le propriétaire faisait étamper les nègres qu’il venait d’acheter ; on leur imprimait au fer chaud ses initiales ou une marque particulière sur les deux côtés de la poitrine, car les négriers les avaient déjà fait marquer sur les épaules.

Il est assez difficile de donner des indications absolument précises sur le prix de revente des nègres. Nous avons vu (page 102) que les écarts extrêmes pour l’achat aux côtes d’Afrique avaient varié de 30 à 500 livres. De même, il y eut de très grandes différences pour la vente aux Antilles, suivant les époques et les individus. Les prix, relativement peu élevés tout à fait au débuts parce qu’on trouvait des noirs en abondance dans leur pays d’origine et qu’ils n’étaient pas encore très demandés aux îles, montèrent considérablement à mesure que la marchandise devenait plus rare et était plus recherchée. Il faut tenir compte aussi des temps de

  1. Moreau de Saint-Méry, I, 671.
  2. Arch. Col., F, 248, p. 773.