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la ruine évidente du royaume, comme s’il eust fallu de nouveau reconquester telles places par le moyen desquelles ils tenoient en subjection les catholiques, et les desarmoient, encore qu’ils fussent en beaucoup plus grand nombre que les huguenots.

Cela occasionna la Reyne, par meur et prudent conseil, mesmement du chancelier de L’Hospital et des confederez, craignant que le Roy ne se trouvast à la fin dépouillé de son Estat, estant toutes choses réduites à l’extrémité de la guerre civile, d’escrire au prince de Condé pour le prier de venir à la Cour, où elle esperoit que toutes choses se pacifieroient à son contentement et pour le bien du royaume. La cour de parlement de Paris luy escrivit[1] semblablement, luy faisant

  1. La cour de parlement de Paris lui escrivit. Cette lettre peut passer pour un modèle de sagesse et de modération. Le prince de Condé se plaignoit de ce que le Roi et sa mère étoient prisonniers des Guise, et de ce que les édits de juillet et de janvier n’avoient pas été exécutés. Le parlement réfute victorieusement ces deux griefs. « Le principal point de vos plaintes, dit-il, est qu’on vous a rapporté que le Roy et la Reyne sont en captivité. Nous vous supplions n’adjouster et plus foy à tels mauvais rapports, qui, tant plus seront publiés, moins seront creus, puisque, non seulement les subjets du Roy, mais tous ses voisins sçavent que le roy de Navarre, vostre frère aisné, tant vertueux et sage, qu’il a tant par évidence monstre l’amour et obéissance qu’il porte aux magistrats et à la conservation du royaume, est avec eux, et ne permettroit pas qu’il leur fust faict tort, tant petit qu’il fust, estant oncle et lieutenant general, représentant la personne dudict seigneur, et a le moyen d’y résister, quiconque fust si osé de l’entreprendre ; et que monseigneur le cardinal de Bourbon, vostre autre frère, l’accompagne, très prudent, et non moins affectionné à la couronne que vous. Ils sont très-contens du gouvernement, vous désirent unis avec eux et les autres princes et seigneurs dudict conseil : ce doit vous estre une preuve certaine de la malice desdicts rapports ; lesquels, si la magnanimité et fidélité desdicts roy de Navarre et mondict seigneur le cardinal de Bourbon, n’estoient