Page:Perochon - Nene.djvu/166

Cette page a été validée par deux contributeurs.
160
NÊNE.

Madeleine les regardait courir devant elle et elle les trouvait beaux comme des enfants de riches.

Elle leur avait mis les bas neufs et leurs petites jambes paraissaient au travers ; au dernier moment, elle avait encore cousu à la culotte de Jo une double rangée de boutons de nacre ; sur son bras, elle portait les deux sarraus qu’elle avait achetés au pauvre marchand.

Elle aussi avait fait sa toilette. Elle avait mis sa jupe des dimanches et son tablier de soie. Quand le vent passait, les rubans de sa coiffe lui claquaient sur la figure. Elle marchait en levant la tête et elle était heureuse tant qu’elle pouvait.

Chez la cousine de l’Ouchette, il y avait ce jour-là une demi-douzaine d’enfants. Lalie et Jo parurent les plus beaux. Quelque dépit qu’elles en eussent, les femmes firent compliment à Madeleine ; elle se rengorgea.

On l’avait fait asseoir au bout de la table, un peu à l’écart parce qu’elle n’était pas de la famille ; elle prit Jo sur ses genoux et le fit manger dans son assiette, disant :

— C’est son habitude… il ne goûterait à rien, autrement.

Et elle parla, soutint les plaisanteries des hommes, conta l’histoire de cette femme d’Auvergne qui avait abandonné ses enfants.

La cousine demanda si c’était le mari de cette femme qui avait vendu la toilette des petits.

— Pas toute leur toilette, dit Madeleine, mais quelques morceaux.