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la guerre des boutons


Je suis chrétien, voilà ma gloire,
Mon espérance…

Lebrac avec Camus, tous deux cachés dans un buisson un peu plus bas que la tranchée du milieu, s’ils voyaient mal le spectacle, ne perdaient rien des paroles.

Tous leurs soldats, le poing crispé sur les gourdins, restaient muets comme les souches sur lesquelles ils étaient à croppetons. Le général, les dents serrées, regardait et écoutait. Quand les voix des Velrans reprirent après le chef :

Je suis chrétien, voilà ma gloire…

Il mâcha entre ses dents cette menace :

— Attendez un peu, nom de Dieu ! je vais vous en foutre, moi, de la gloire !

Cependant, triomphante, la troupe arrivait. Touegueule en tête, la culotte de Tintin servant d’enseigne au bout d’une grande perche.

Quand ils furent à peu près tous alignés dans la tranchée et qu’ils commencèrent, au rythme lent du cantique, à la descendre, Lebrac eut un rugissement épouvantable comme le cri d’un taureau qu’on égorge. Il se détendit tel un ressort terriblement bandé et bondit de son buisson pendant que tous ses soldats, enlevés par son élan, emportés