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la guerre des boutons


établir un plan dont son cerveau depuis quelques heures ébauchait les grandes lignes.

À la récréation, il n’eut point besoin de convoquer ses guerriers. Tous vinrent d’eux-mêmes immédiatement se placer en cercle autour de lui, dans leur coin, derrière les cabinets, tandis que les tout-petits, déjà complices, mais qui n’avaient pas voix délibérative, formaient en jouant un rempart protecteur devant eux.

– Voilà, exposa le chef. Il y en a déjà vingt-sept qui peuvent payer et j’ai pas pu envoyer de lettre à tous. Nous sommes quarante-cinq. Quels sont ceux à qui je n’ai pas écrit et qui ont aussi un sou à eux. Levez la main !

Huit mains sur treize se dressèrent.

– Ça fait vingt-sept et huit. Voyons, vingt-sept et huit… vingt-huit, vingt-neuf, trente… fit-il en comptant sur ses doigts.

– Trente-cinq, va ! coupa La Crique.

– Trente-cinq ! t’es bien sûr ? ça fait donc trente-cinq sous. Trente-cinq sous, c’est pas cent sous, en effet, mais c’est quéque chose. Eh bien ! voici ce que je propose :

On est en république, on est tous égaux, tous camarades, tous frères : Liberté, Égalité, Fraternité ! on doit tous s’aider, hein, et faire en sorte que ça marche bien. Alors on va voter comme qui dirait l’impôt, oui, un impôt pour faire une bourse, une