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ÉTUDES DE LITTÉRATURE

ne flétrit pas seulement les sacrifices affreux de la religion Cretoise, mais encore, mais surtout la Saint-Barthélémy, les dragonnades, le supplice de La Barre, qui sont aussi, dit-il, « de vrais sacrifices de sang humain. »

La philosophie de Voltaire peut se résumer par un mot : humanité. C’est l’amour de l’humanité qui anime son œuvre entière, et toutes les réformes dont il prend l’initiative, c’est l’amour de l’humanité qui lui en a inspiré l’idée. En rappellerai-je quelques-unes ? Il réclame la suppression de la corvée, la liberté du commerce, une répartition plus équitable des impôts ; il veut qu’on institue le jury, qu’on indemnise les accusés dont l’innocence a été reconnue, qu’on ne condamne pas sur des probabilités en additionnant des quarts ou des huitièmes de preuve, comme si huit huitièmes de preuve équivalaient à une preuve entière ; il demande que les peines soient proportionnées aux délits, il proteste contre la torture. Aucun autre écrivain ne servit mieux la morale humaine. Non seulement il éclaira et libéra les esprits, mais il s’appliqua avec un zèle infatigable à introduire dans les rapports des hommes entre eux plus de justice et plus d’amour ; et il fut surtout l’ennemi du fanatisme, l’apôtre de la tolérance.

Si Voltaire n’est pas exempt de faiblesses, ce n’est pas pour ces faiblesses qu’il a des ennemis, c’est pour ce que nous admirons en lui et que nous aimons, pour son action de philosophe, pour la guerre qu’il fit aux abus, aux superstitions, aux iniquités. Bien que tout ne mérite pas l’éloge dans sa vie, ni même dans son œuvre, il n’aura plus d’adversaires quand la raison et la conscience seront définitivement affranchies. On