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ÉTUDES DE LITTÉRATURE ET DE MORALE

naire philosophique, de l’Essai sur les mœurs des Mélanges, de tant de pamphlets où il a combattu le fanatisme, l’intolérance, l’inhumanité ; ce qu’on attaque en lui, c’est le « philosophe. » Ainsi l’appelaient ses contemporains. Mais le mot n’a plus la même signification. Et, à vrai dire, j’aurais pu intituler cette conférence Voltaire moraliste aussi bien que Voltaire philosophe, car toute la philosophie de Voltaire aboutit à la morale de même qu’elle en procède.

Il faut d’ailleurs s’entendre. Le nom de moraliste désigne ordinairement des écrivains qui peignent les mœurs ou qui étudient l’homme soit en tant qu’individu, soit dans ses rapports avec la société mondaine. Tels, par exemple, La Rochefoucauld et La Bruyère. Et même, d’une façon générale, tous les auteurs du dix-septième siècle sont des moralistes : Racine, qui anatomise si délicatement les passions de l’amour ; La Fontaine et Molière, qui mettent en scène la vie et le monde de leur époque ; Bourdaloue, dont les sermons contiennent si souvent des analyses psychologiques et jusqu’à des portraits. Ce n’est pas en ce sens que Voltaire est moraliste. La littérature du dix-septième siècle s’intéressait surtout aux relations civiles. Celle du dix-huitième considère l’homme comme membre de la société politique. Et c’est par laque sont des moralistes les « philosophes » contemporains. Mais Voltaire en mérite le nom plus qu’aucun d’eux, car sa philosophie consiste à répandre les idées sociales de justice, de bienfaisance, d’humanité.

Je ne parlerai pas du métaphysicien. Ou plutôt — car il faut bien que j’en parle, — je n’en parlerai que pour montrer comment il subordonne la métaphysique à la morale. Vous savez quelle définition