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ŒUVRES POSTHUMES d'en rencontrer des prolongements inconnus, des antennes de lumière obscurément poussées, indéfini- ment projetées, allongées dans des parages, dans des régions, dans des matières éloignées, où imprudent on s'y attendait le moins. C'est la marque même, c'est le propre d'une très grande philosophie que de n'avoir pas seulement une force logique, (dé)limitée, dont on pourrait découper les bords, mais à son tour une force de race, une race littéralement organique, une force organique, une force féconde, une force d'événement et de réalité, de dépasser ainsi dans tous les sens, de déborder de toutes parts son objet propre, son premier domaine, sa matière, son objet particulier. Mais moi je sais qu'il y a le vieillissement. Le vieillissement de tout homme et le vieillissement de tout le monde. La durée réelle, mon ami, celle qui sera toujours nommée la durée bergsonienne, la durée organique, la durée de l'événement et de la réalité implique essentiellement le vieillissement. Le vieillissement est essentiellement organique. Le vieillissement y est incorporé au cœur même de l'organisme. Naître, grandir, vieillir, devenir et mourir, croître et décroître, c'est tout un ; c'est le même mouvement ; le même geste organique ; c'est tout ce que nos anciens disaient excellemment être du domaine de la corruption. De la naissance temporelle à la mort temporelle il y a un certain chemin que le voya- geur (c'est nous, mon ami, c'est tout homme, c'est toute (l')humanité, c'est toute (la) création temporelle), il y a un certain itinéraire, (et par suite un certain

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