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que la bactéridie charbonneuse est essentiellement aérobie à toute époque de son existence. Quelle différence donc entre le vibrion septique et cette bactéridie, et n’est-il pas remarquable de voir se multiplier dans l’organisation animale des êtres aussi dissemblables par leur mode de nutrition !

Une autre question non moins intéressante est celle de savoir si les corpuscules germes du vibrion septique, quoique formés dans le vide ou dans le gaz carbonique pur, n’auraient pas besoin pour renaître à la vie de faibles quantités d’oxygène. La physiologie ne connaît pas aujourd’hui de germination possible hors du contact de l’air. Eh bien ! néanmoins, l’expérience prouve que les germes du vibrion septique sont absolument stériles au contact de l’oxygène, quelle que soit la proportion de ce gaz ; mais c’est à la condition, toutefois, qu’il y ait un certain rapport entre le volume de l’air et le nombre des germes, car les premières germinations, enlevant l’air qui est en dissolution, peuvent devenir une protection pour les germes restants, et c’est ainsi qu’à la rigueur le vibrion septique peut se propager, même en présence de faibles quantités d’air, bien que cette propagation soit irréalisable si l’air afflue.

Une observation thérapeutique curieuse se présente. Que l’on suppose une plaie exposée au contact de l’air et dans des conditions d’état putride pouvant amener chez l’opéré des accidents septicémiques simples, je veux dire sans autre complication que celle qui résulterait du développement du vibrion septique. Eh bien, théoriquement du moins, le meilleur moyen auquel on pût recourir pour empêcher la mort consisterait à laver sans cesse la plaie avec une eau commune aérée ou à faire affluer à sa surface l’air atmosphérique. Les vibrions septiques adultes, en voie de scissiparité, périraient au contact de l’air ; quant à leurs germes ils seraient tous stériles. Bien plus, on pourrait faire arriver à la surface de la plaie l’air le plus chargé de germes de vibrions septiques, laver la plaie avec une eau tenant en suspension des milliards de ces germes, sans provoquer pour autant la moindre septicémie chez l’opéré. Mais que, dans de telles conditions, un seul caillot sanguin, un seul fragment de chair morte se loge dans un coin de la plaie à l’abri de l’oxygène de l’air, qu’il y demeure entouré de gaz acide carbonique, ne fût-ce que sur une très-faible