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tradition qui, pour se transformer, attendait encore la plume des romanciers de la Table ronde. Mais, puisqu’on ne retrouve dans le poëme de Merlin aucun trait qui soit inspiré par ces romans de la Table ronde ; puisque la Genièvre, l’Artus, la fée Morgan ne sont pas encore ce qu’ils sont devenus dans ces romans, il faut absolument en conclure que le poëme a été composé avant les romans, c’est-à dire de 1140 à 1150. Il n’était plus permis, après la composition de l’Artus et du Lancelot, de ne voir qu’une fée dans Morgan, que l’épouse d’Artus enlevée par Mordred dans Genièvre, et que le mari d’une femme délaissée dans Merlin. Ainsi tout se réunit pour conserver à Geoffroy de Monmouth l’honneur d’avoir écrit, vers le milieu du douzième siècle, le poëme De Vita Merlini, après l’Historia Britonum que semble continuer le poëme, pour ce qui touche à Merlin, et avant le roman français de Merlin, qui devait faire au poëme d’assez nombreux emprunts.

Je regrette donc infiniment de me trouver ici d’une opinion opposée à celle de mes honorables amis, M. Thomas Wright et M. Fr. Michel, auxquels on doit d’ailleurs une excellente édition de la Vita Merlini[1]. Oui, le

  1. Publiée d’après le manuscrit de Londres. Paris, Didot, 1837 ; in-8.