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blement n’existaient pas encore. Mais c’est aux légendes latines que Geoffroy va surtout demander les couleurs qu’il étend sur la première trame. Le voyage de Brutus et l’apparition des Sirènes sont empruntés à l’Énéide. La prêtresse de Diane arrêtant Brutus pour lui révéler ses destinées est imitée d’un chapitre de Solin. L’histoire d’Uter-Pendragon et d’Ygierne est le plagiat de la fable d’Amphitryon. Le roi Bladus avec ses ailes de cire est le Dédale des Métamorphoses. Le combat d’Artus contre le géant du mont Saint-Michel est la contrefaçon de la lutte d’Hercule et de Cacus. On ne pensera pas assurément que toutes ces belles choses, ignorées de Nennius, aient pu se rencontrer dans un livre écrit en bas breton longtemps avant le douzième siècle. Mais on admettra volontiers qu’un habile homme, tel qu’était réellement Geoffroy de Monmouth, ait eu recours à Virgile, à Ovide, pour broder la très-simple trame de Nennius, et il sera toujours aisé de faire la part de chacun d’eux. C’est ainsi que les brillantes couleurs d’une verrière n’empêchent pas de suivre les tiges de plomb qui l’enchâssent et la retiennent. Je ne veux pourtant pas dire que Geoffroy de Monmouth n’ait dû qu’aux poëtes latins tout ce qu’il a ajouté à Nennius : il a pris aux traditions locales ce qu’il a écrit des pierres druidiques de Stonehenge, transportées