Page:Paris, Paulin - Romans de la Table Ronde, tome 1.djvu/24

Cette page a été validée par deux contributeurs.

n’attend pas, pour se révéler, la réunion de plusieurs centaines d’instruments et de chanteurs : il agit sur l’âme humaine en tous temps, en tous pays, comme une sorte d’aspiration involontaire vers des voluptés plus grandes que celles de la terre. Ce sentiment, il est malaisé de le définir ; plus malaisé de s’y soustraire. Je ne tiens pas compte ici des exceptions ; je parle pour la généralité des hommes. Il en est parmi nous quelques-uns qui ne voient dans le système du monde qu’un jeu de machines, organisé de toute éternité par je ne sais qui, pour je ne sais quoi. D’autres ne reconnaissent dans les plus suaves mélodies qu’un bruit d’autant plus tolérable qu’il est moins prolongé. Ces natures exceptionnelles, et pour ainsi dire en dehors de l’humanité, ne détruiront pas plus l’instinct de la musique que l’idée non moins innée, non moins instinctive de la Providence[1].

  1. Quand nos ancêtres admettaient les chanteurs et les joueurs d’instruments dans toutes leurs fêtes et dans toutes leurs expéditions guerrières, ils nous donnaient un exemple que nous avons suivi. Il n’y a pas aujourd’hui un seul régiment qui n’ait son corps de musiciens. Seulement, au lieu de généreux chants de guerre, nous avons de grands effets d’instruments aussi bien appréciés des chevaux que des hommes. Dans le moyen âge, le roi des ménestrels n’était souvent que le chef d’orchestre d’un corps de musiciens, et je