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ajoutés à l’œuvre ancienne. Par exemple, il y a plusieurs couplets frais et gracieux comme celui-ci :


MELCHI.

Que feront, tandis, brebiettes,
Que les pastoureaux repaistront ?


ACHIN.

À l’ombre, sous les espinettes,
Et à la senteur des herbettes,
Doulcement se reposeront.


MELCHI.

Les pastourelles chanteront.


ACHIN.

Pastoureaux getteront œillades.


MELCHI.

Les Nimphes les escouteront,
Et les Driades danseront
Avec les gentes Oréades.


On dira que voilà des bergers bien savants mais de quel droit l’auraient-ils moins été que ceux de Virgile et de Théocrite ? On ne saurait le dire. J’en conclus seulement une fois de plus que la Critique s’est trompée en soutenant qu’une seule pensée avait préoccupé les auteurs de Mystères ; celle de retracer, dans les hommes et les choses d’autrefois, les scènes de la vie commune qu’ils avaient sous les yeux. Non, l’Art, pour eux, ne se réduisait pas à cette copie, à ce fac similé fidèle, et rien ne me semble plus inexact qu’une telle appréciation. La vie mondaine de Lazare et de Magdeleine, les entretiens de la cour d’Hérode, les discussions de Pilate avec les Juifs, et surtout les adieux de Jésus et de Marie, sont des tableaux qui appartiennent à l’art le plus élevé, ils font également honneur au peintre qui les a tracés et au public qui s’en montrait le judicieux admirateur.

L’ouvrage d’Arnoul Gresban, divisé en trois journées, est devenu sous la plume de Jean Michel, un premier Mystère de la Nativité de la Vierge et de Jésus-Christ, puis un Mystère de la Passion en quatre journées ; le tout formant un peu moins de cinquante mille vers. C’est, comme on voit, bien près du double de la Passion de Gresban. Cependant, à tout prendre, la composition du premier auteur