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nourrir et d’en prendre grand soin. Tout est charmant dans ce récit, et l’on ne sait qu’y admirer le plus, ou de la tendre faiblesse du saint pour les petits agneaux, ou de sa candide confiance en leur maître.[1]

Si François, par son innocence et sa simplicité, était revenu pour ainsi dire à la condition d’Adam, lorsque ce premier père voyait toutes les créatures dans une lumière divine et les aimait d’une fraternelle charité, les créatures, à leur tour, lui rendaient la même obéissance qu’au premier homme, et rentraient pour lui dans l’ordre détruit par le péché. C’est un trait remarqué chez plusieurs saints, que ces âmes régénérées avaient ressaisi l’ancien empire de l’homme sur la nature. Les Pères de la Thébaïde étaient servis par les corbeaux et les lions ; saint Gall commandait aux ours des Alpes ; quand saint Colomban traversait la forêt de Luxeuil, les oiseaux qu’il appelait venaient se jouer avec lui, et les écureuils descendaient des arbres pour se poser sur

  1. Thomas de Celano, IX, saint Bonaventure, VIII : « Consideratione quoque primae originis, omnium abundantiori pietate repletus, creaturas quantumlibet parvas, fratris vel sororis appellabat nominibus. » Id., IX : « Exultabat in cunctis operibus manuum Domini, et per jucunditatis specula in vivificam consurgebat rationem et causam. Contemplabatur in pulchris pulcherrimum, et per impressa rebus vestigia prosequebatur ubique dilectum, de omnibus sibscalam faciens in eum qui est desiderabilis totus... Pietas... quae ipsum per devotionem sursum agebat in Deum, per compassionem transformabat in Christum, per condescensionem inclinabat ad proximum, et per universalem conciliationem ad singula refigurabat ad innocentiae statum».