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soixante talents d’une évocation peinte par Nicias. On admirait à Delphes la grande composition où Polygnote avait représenté Ulysse interrogeant les ombres[1]. Tout le théâtre athénien était rempli des spectacles de la mort. Avant qu’Aristophane y eût montré sesGrenouilles, et le pélerinage ridicule de Bacchus chez Pluton, on avait vu l'Alceste d’Euripide, où le Trépas (Θάνατος) se montrait en personne, et disputait à Apollon l’héroïque épouse d’Admète[2] ; Sophocle, dans l’Hercule au Ténare , avait célébré l’enlèvement de Cerbère. Le même genre de merveilleux soutenait deux tragédies perdues d’Eschyle, la Psychagogie ou le Voyage des Ames, et les Aventures de Sisyphe, à qui Pluton permettait de retourner sur la terre pour y prendre soin de sa sépulture, et qui, abusant du congé, était ramené de force aux sombres bords. Si une inten-

  1. Pausanias, X, 28. Pline, cité par Winkelman Monument. ant. ined., p. 211. —Creutzer, Symbolik, atlas, tab. 56, etc.
  2. C’est Hercule qui la lui arrache à la fin de la tragédie, et je ne puis m’empêcher de citer ces vers d’une théologie étrange ; Hercule parle : « J’irai, j’épierai le Trépas au noir vêtement, ce roi des morts. Je pense le trouver s’abreuvant du sang des victimes auprès du tombeau je t’attendrai en embuscade, et, me montrant tout à coup, je le saisirai, je le serrerai de mes mains et nul ne m’arrachera de sa poitrine haletante, jusqu’à ce qu’il m’ait rendu l’épouse d’Admète.  »
    Ἐλθῶν δ ἂνακτα τὸν μελάμπεπλον νεκρῶν
    θάνατου φυλάξω κάί νιν εὑρήσειν δοκῶ

    Dans l’Hercule furieux d’Euripide, le récit de la descente aux enfers trouvait aussi sa place.