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lut reproduire, non-seulement le dogme, mais la tradition, qui lui donnait la couleur et le mouvement l’enfer, le purgatoire, le paradis, peuplés de figures connues, avec des supplices qui se touchent, et des récompenses qui se voient. Il trouvait cette tradition dans un cycle entier de légendes, de songes, d’apparitions, de voyages au monde invisible, où revenaient toutes les scènes de la damnation et de la béatitude. Sans doute il devait mettre l’ordre et la lumière dans ce chaos, mais il fallait qu’avant lui le chaos existât.


II

I. Dante n’avait pu visiter l’Italie et la France sans y trouver, pour ainsi dire à tous les pas, la Vision de la Divine Comédie. S’il entrait dans les grandes basiliques de Pise, de Rome, de Venise, il voyait au fond de l’abside ces mosaïques éblouissantes d’or cette figure colossale du Christ, avec un regard immobile comme l’éternité tout autour, les images des anges et des saints, couronnés d’auréoles. L’architecture symbolique de ce temps voulait que le sanctuaire représentât le ciel. A Sainte Marie d’Orvieto il avait dû contempler avec admiration les bas-reliefs de la façade, où Nicolas de Pise, aidé de quelques ouvriers allemands, avait représenté le jugement, le paradis et l’enfer, s’ap-