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ches a ces prédications toutes pleines des souvenirs de l’éternité, la terreur des jugements divins enveloppa le poëte, toutes les résistances furent forcées, et sa grande âme se rendit. Les allusions du IX° chant du Purgatoire trahissent son dernier secret. On le voit le jeudi saint, le jour où on faisait l’absoute publique des pèlerins, où siégeait à SaintPierre le grand pénitencier dans l’exercice solennel de son ministère, s’agenouiller aux pieds de celui qui l’absout, et qui lui ouvre avec les clefs de saint Pierre la porte sainte du pardon[1]. C’est dans ce moment d’une conversion disputée, dans le boule-

  1. Cette conjecture est fondée sur l’opinion que Dante est surtout un génie sincère, qui ne feint pas gratuitement, et que derrière sès fables il y a toujours plus de vérité qu’on ne pense. C’est dans cet esprit que j’interprète )e texte du Purgatorio, chant IX, terc. 31 et suiv. On est au quatrième jour du pélerinage, te 7 avril au matin : c’est précisément le jeudi saint, jour de l’absolution générale des pécheurs, qui faisaient pénitence publique. Dante arrive à une porte mystérieuse qui rappelle la porte sainte du jubile. Trois degrés y conduisent l’un, de marbre blanc et poli l’autre, d’une pierre sombre, rude et calcinée ; le troisième, d’un porphyre d’une couleur sanglante. Ce sont les trois conditions de la pénitence : la confession sincère, la contrition, la satisfaction. Tous tes interprètes l’entendent ainsi. L’ange, image du prêtre, est assis en haut. Il tient à la main l’épée dont il touche le front des pécheurs, comme le pénitencier frappe de sa baguette la tête des pèlerins agenouillés devant lui. Dans sa main sont les deux clefs, l’une d’or, l'autre d’argent ;.l’une symbole de l'autorite, l’autre de la science sacerdotale. Mais toutes deux, il les a reçues de saint Pierre « Da’Pier le tengo ». C’est l’exercice d’une prérogative papale. Le poète-se jette à ses pieds, il frappe trois fois sa poitrine c’est le rite même de la confession sacramentelle. Que faut-il de plus pour reconnaître l’acte où le poète repentant reçut le pardon, et qu'il voulut marquer d’un souvenir ineffaçable ? L’Ottimo commento semble l’entendre comme moi : « Convertito l’ autore per la illuminaziono della divina grazia, accède al vicario di Cristo per confessare le peccata.»