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rité de son nom, portées sur les ailes de la rime et du chant, allaient susciter des ennemis à Boniface VIII d’un bout à l’autre de l’Italie. C’est vers le même temps que les biographes de Jacopone fixent la date d’une satire trop célèbre, où l’on aperçoit, derrière le Franciscain fourvoyé, la main des hommes d’État qui le poussent la chanson italienne prépare les voies aux griefs articulés bientôt après par les jurisconsultes de Philippe le Bel : «  Ô pape Boniface tu as joué beaucoup au jeu de ce monde je ne pense pas que tu en sortes content. Comme la salamandre vit dans le feu, ainsi dans le scandale tu trouves ta joie et ton plaisir. Tu tournes ta langue contre toute règle religieuse, et tu profères le blasphème au mépris de toute loi. Ni roi, ni empereur, ni quelque autre que ce fût, ne te quitta jamais sans emporter une cruelle blessure. Ô criminelle avarice ! soif prodigieuse, capable de boire tant d’argent et d’être encore altérée ! » Il faut assurément détester ce langage mais il faut rappeler que Jacopone, égaré, croyait flétrir un usurpateur, et non le chef légitime de l’Église. Il faut enfin considérer le péril d’un siècle de luttes où deux grands esprits peuvent se rencontrer sans se reconnaître, et employer à se combattre des armes qu’ils devaient réunir pour le service de Dieu. D’autres se scandaliseront d’un tel spectacle nous pouvons nous y instruire. Nous y apprendrons, pour les