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mite Pierre de Morrone. Quand l’austère vieillard, tiré de sa cellule et couronné sous le nom de Célestin V, eut pris le gouvernement du monde chrétien, tout son zèle se déclara pour la stricte observance des règles monastiques : les Frères Spirituels obtinrent de lui le privilège de vivre selon la première rigueur de l’Ordre, dans des couvents séparés et sous des supérieurs de leur choix. Ce bienfait devait toucher Jacopone ; il montra sa reconnaissance en homme moins jaloux de plaire à ses amis que de sauver leurs âmes. Il adressa au nouveau Pontife une épître en vers, dont les rudes avertissements s’accordaient mal avec le langage ordinaire des cours : « Que vas-tu faire, Pierre de Morrone ? Te voilà venu à l’épreuve : nous verrons l’œuvre que préparaient les contemplations de ta cellule. Si tu trompes l’attente du monde, malédiction s’ensuivra. — Comme la flèche vise au but, ainsi le monde entier regarde vers toi : si tu ne tiens la balance droite, c’est à Dieu qu’on appellera de tes jugements. — Je ressentis pour toi une grande amertume de cœur, quand sortit de ta bouche ce mot : Je le veux, qui te mit sur le cou un joug assez lourd pour faire craindre ta damnation. — Défie-toi des bénéficiers, toujours affamés des prébendes. Leur soif est telle, que nul breuvage ne l’éteint. — Garde-toi des concussionnaires, ils te montreront blanc ce qui est