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empêcher ce progrès ? Mais qu’il soit progrès et non changement… Il faut qu’avec les âges et les siècles il y ait accroissement d’intelligence, de sagesse, de science, pour chacun comme pour tous. » Bossuet continue la tradition des Pères, et ce grand homme, si ennemi des nouveautés, croit au progrès dans la foi. « Pour être constante et perpétuelle, la vérité catholique ne laisse pas d’avoir ses progrès : elle est connue en un lieu plus qu’en un autre, en un temps plus qu’en un autre, plus clairement, plus distinctement, plus universellement. »

Je ne m’étonne pas de cette différence de sentiments entre l’antiquité et les temps chrétiens. Le progrès est un effort par lequel l’homme s’arrache à son imperfection présente pour chercher la perfection, au réel pour s’approcher de l’idéal, à lui-même pour s’élever à ce qui vaut mieux que lui. Il n’y a pas de progrès si l’homme s’aime, s’il est content de son ignorance et de sa corruption. Les anciens connurent sans doute le divin attrait de la perfection, ils en approchèrent sur plusieurs points. Mais elle ne se montrait à eux que dans une image troublée et obscurcie, et les âmes qu’elle avait un moment soulevées, appesanties par l’égoïsme païen, finissaient par retomber sur elles-mêmes. Afin que l’homme sortît de lui-même, qu’il en sortît, non pour un moment, mais pour toujours, il fallait que la perfection pure lui apparût et que Dieu se révélât.

Le Dieu du christianisme se révèle comme vérité, comme bonté, comme beauté.