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les deux extrémités de la terre. C’est à son pacifique génie que nous devons tous de trouver la patrie sous des cieux étrangers, de changer impunément de demeure. Par elle ce n’est plus qu’un jeu de visiter les bords glacés de Thulé et de pénétrer en des régions dont le nom seul faisait l’horreur de nos pères ; par elle nous nous abreuvons à notre gré aux flots du Rhône ou à ceux de l’Oronte ; par elle nous ne sommes tous qu’un seul peuple, et son empire ne connaîtra pas de fin. La sibylle le lui promit, les rites sacrés de Numa font sa vie, Jupiter ne tonne que pour elle, et Pallas la couvre de toute son égide. »

Hæc est in gremium victos quæ sola recepit,
Humanumque genus communi nomine fovit,
Matris, non domina ritu…
Hujus pacificis debemnus logibus omnes…
Quod cuncti gens una sumus
[1]

J’ai dû parler de Claudien avec quelques détails, car il marche assurément entre les premiers après Lucain ; ce poëte, que je ne crains pas de mettre au-dessus de Stace et de tous les poëtes postérieurs, a un singulier éclat d’images, une richesse étonnante de figures et une chaleur qui plus d’une fois lui fait rencontrer les véritables éclairs du beau langage. Cependant je ne puis pas dissimuler ses vices : toutes ces grandes qualités, il les a portées, pour son malheur, au service d’une religion qui alors n’inspirait plus personne ; car je re-

  1. Claudiani de Consulatu Stilichonis, lib. III, v. 156-158.