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En effet, si le christianisme ne permettait plus d’adorer la nature, il n’est pas vrai qu’il la maudît, ni qu’il réprouvât tout ce qui fait la beauté visible de l’univers. Il trouvait non-seulement dans les cultes païens, mais dans la liturgie judaïque, un symbolisme qui employait les créatures comme autant de signes d’un langage sacré entre l’homme et le Créateur. Le candélabre à sept branches éclairait le sanctuaire de Moïse, les résines d’Arabie brûlaient sur l’autel, et chaque année le peuple cueillait des palmes et des feuillages pour la fête des tabernacles. Ces rites de toutes les religions devaient passer dans la religion nouvelle. Déjà le poëte Prudence convie au tombeau de sainte-Eulalie les vierges chrétiennes, et leur demande pour la jeune martyre des fleurs à pleines corbeilles. En même temps s’introduisit l’usage de brûler des cierges devant les sépultures des saints. Le prêtre Vigilance s’éleva contre cette pratique, et la taxa d’idolâtrie. Mais saint Jérôme répondit, et avec la lucidité de son génie il embrassa du premier regard toute l’étendue de la question : « Vous appelez ces chrétiens idolâtres, dit-il, je ne le nie point : nous tous qui croyons au Christ, nous venons de l’idolâtrie. Mais, parce qu’autrefois nous rendîmes un culte aux idoles, n’en faut-il plus rendre au vrai Dieu ?… Toutes les Églises de l’Orient allument les flambeaux au moment de lire l’Évangile, non pour dissiper les ténèbres, puisque, à cette heure, le soleil brille de tout son éclat, mais en signe de joie, mais en mémoire de ces lampes qu’entretiennent les vierges