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ment la théologie fabuleuse des poëtes, la théologie politique des hommes d’État, la théologie naturelle des philosophes. En même temps qu’il levait les dernières difficultés des savants, il ne laissait plus de prétexte aux répugnances des lettrés. Cette religion qu’ils accusaient de ramener l’ignorance et la barbarie leur montrait déjà des beautés qui promettaient d’égaler l’antiquité profane. Qu’était-ce que l’élégance de Symmaque pour tenir contre les foudres des apologistes chrétiens[1].

Toutefois l’Évangile n’aurait pas changé le monde, s’il ne se fût adressé qu’aux lettrés et aux savants. La philosophie fit cette faute. Platon écrivit sur la porte de son école : « Que nul n’entre ici s’il n’est géomètre ; » et, sept cents ans plus tard, Porphyre avouait « qu’entre tant de sectes il n’en connaissait aucune qui eût enseigné la voie de la délivrance pour toutes les âmes. » Mais le christianisme avait trouvé la voie universelle de la délivrance. C’était sa nouveauté d’évangéliser les pauvres, et longtemps les persécuteurs lui reprochèrent de recruter ses disciples dans les ateliers, chez les tisserands et les foulons. Au commencement du cinquième siècle, la population laborieuse des villes, celle qui habitait, comme dit un poëte, les derniers étages des maisons, appartenait presque entière au culte nouveau.

  1. S. August., epist. 158, Marcellino : « Verum tamen cognosce quid eos contra moveat, atque rescribe, ut vel epistolis vel libris, si adjuverit Deus, ad omnia respondere curemus. » De Civitate Dei, prœfatio ad Marcellinum.