Page:Ozanam - Œuvres complètes, 2e éd, tome 01.djvu/164

Cette page a été validée par deux contributeurs.

stantin régnait déjà, et le christianisme avec lui ; les prêtres païens continuaient cependant d’offrir chaque année une patère de sang humain à Jupiter Latial. Vainement les Romains avaient interdit aux nations vaincues les égorgements, dont ils donnaient l’exemple. Au troisième siècle, on trouve encore des immolations humaines en Afrique et en Arcadie. Toutes les lois de la civilisation ne purent étouffer ces instincts de bête sauvage que le paganisme démuselait au fond de l’homme déchu[1].

Mais l’homme ne pouvait fuir le bien véritable sans poursuivre les faux biens : la peur, qui l’éloignait de Dieu, le précipita dans la concupiscence, et le culte de la terreur devint aussi la religion de la volupté. Il faut ici dévoiler les derniers excès de l’erreur, ne fût-ce que pour désabuser un grand nombre d’esprits, qui, gênés par la sévérité de l’Évangile, se tournent avec regret vers l’antiquité, et demandent en quoi la civilisation romaine était inférieure à la chrétienne. Si la nature offre partout le spectacle de la mort, elle ne prodigue pas moins celui de la vie. L’homme y voit la même puissance qui est en lui pour la perpétuité de sa race, et dont il peut abuser pour sa perte ; il sent s’exhaler de tout ce qui l’environne je ne sais quel charme dangereux et capable de lui faire oublier ses destinées spi-

  1. Macrobe, Saturnal., I, 7 ; Valère Maxime, II, 4, 7 ; Pline, Hist. nat., lib. XXVIII, cap. 2 ; Plutarque, Quæst. Rom., 83 ; Suétone, Vita Octavii, 15 ; Tertullien, Apologetic., 9 ; Prudence, Contra Symmachum, I vers 535 et suiv. Cf. Tzschirner, der Fall des Heidenthums, p. 34 et suiv.