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LES AMOURS

Fruit des noces d’Hippodamie.
D’un Centaure je n’ai ni les mœurs ni le bras ;
Crains pourtant mon jaloux délire.
.Sache alors tes devoirs : de grâce, qu’au zéphire
Mes conseils ne s’envolent pas.
Viens avant ton mari : que ferons-nous sur l’heure ?
Je ne sais ; viens toujours avant.
Il paraît… feins un air modeste, en le suivant ;
Mais qu’en passant ton pied m’effleure.
De ton lit, vois mon front et mes gestes adroits ;
Réponds-leur vite avec prudence.
Mes sourcils, sans parler, auront de l’éloquence ;
Tout t’instruira, mon vin, mes doigts.
Si de nos doux plaisirs l’idée en toi s’éveille,
Pince ta joue au teint rosé.
M’as-tu de quelque faute en secret accusé,
Mollement tire ton oreille.
Mon astre, t’ai-je plu par mes mots, mon entrain,
Que ta bague en cercle s’agite.
Invoques-tu l’enfer que ton époux mérite,
Comme en priant, étends la main.
S’il remplissait ta coupe, eh ! dis-lui qu’il la vide !
Puis demande un vin de ton choix.
Après toi je veux boire au calice où tu bois :
J’y chercherai ta trace humide.
T’avance-t-il un mets que lui-même a goûté ?
Jette ce poison sous la table.
Soustrais ton cou d’ivoire à son bras détestable,