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d’hui admet seulement que toute puissance qui touche à la mer étend son empire jusque la plus grande portée de canon au delà de la terre. C’est la mer territoriale. Au de là commence la haute mer. — La surface des mers est de 365 millions de kilomètres carrés ou 71.8 p. c. de la surface du globe, tandis que la terre ferme en occupe 144 millions ou 28.2 p. c.

Doivent aussi être du domaine international, les mers intérieures et les lacs internationaux, c’est-à-dire les lacs que traversent les fleuves internationaux ou que ces fleuves font communiquer directement avec l’Océan. Les lacs internationaux sont, en Europe, les lacs de Constance, Léman, Majeur et de Lugano ; en Amérique les grands lacs Supérieurs Huron, Érié et Ontario.

Un grand nombre de conventions internationales ont déjà réglé certaines questions relatives à la mer, et intéressant tous les peuples. Par exemple, le traité du 16 novembre 1889, destiné à restreindre le commerce en mer des boissons alcooliques ; les conventions relatives à l’assimilation aux eaux maritimes des détroits et canaux interocéaniques ; celles relatives à la pêche[1].

La liberté des mers est un point remis en discussion par cette guerre ; cette question est ancienne. L’Empire romain encadrait la Méditerranée « mare nostrum ». L’Angleterre doit à la mer sa prodigieuse fortune et son impérialisme. Le Japon tend à bénéficier des mêmes destinées. Au XVme siècle, les Portugais et les Espagnols acceptèrent que le Pape Alexandre VI partageât, par une ligne fictive allant de l’un à l’autre pôle, les îles et territoires litigieux entre eux, attribuant portion égale à chacun des continents. La sentence papale du 4 mai 1493, établissant la célèbre ligne alexandrine, devint la « grande Charte » sur laquelle les plus grandes puissances coloniales de l’époque fondèrent désormais leurs droits. Elle donna une force nouvelle à l’idée que les successeurs de saint-Pierre disposaient à leur gré de toutes les terres découvertes et à découvrir[2].

Dès l’année suivante cependant le traité de Tordesillas modifiait la ligne de partage et bientôt furent affirmées les prétentions exclusives des parties à l’usage des routes maritimes conduisant à leurs possessions. Antérieurement, Venise et Gènes avaient affirmé leurs droits exclusifs sur l’Adriatique et sur la mer ligurienne. Ces prétentions ab-

  1. Certaines mers possèdent en permanence une population mobile aussi dense que celle de quelques régions continentales. Le Dogger Bank et le grand banc de Terre-Neuve sont de véritables prolongements de la terre habitable. L’Océan Atlantique entre le Cap Lizzard et l’Amérique du Nord est aussi peuplé que la côte Sibérienne. La Manche est plus peuplée que la province d’Iakoutsk. (L. Raveneau, Annales de géographie, 1891-1892, page 336).
  2. V. Montesquieu, L’Esprit des lois, L 2. chapitre 21. — Vattel, Le droit des gens. — Mesa et Leompart, Précis de l’histoire de l’Amérique, 1870, I, page 52. — Fiore, Nouveau droit international, LL. 23, IX.