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projet de loi récent y propose même de soumettre au referendum la ratification des traités internationaux. Les États-Unis sont favorables à la publicité sous toutes les formes ; les traités secrets y sont aussi interdits.

3. Tous les arguments qu’on fait valoir contre la démocratisation de la politique nationale ont été allégués en leur temps contre la démocratisation et la publicité de la politique nationale. Les réformes accomplies dans celle-ci démontrent par analogie le peu de fondement des objections présentées contre la réforme de celle-là. Jusqu’en 1815 les délibérations des États généraux en Hollande étaient secrètes. Les Belges demandèrent et obtinrent qu’elles devinssent publiques. Ils alléguèrent le danger de voir donner par le peuple de faux motifs aux décisions prises.

On peut se demander il est vrai si les peuples, c’est-à-dire les gouvernés, sont plus pacifiques que les gouvernements. Que de guerres ont eu un caractère réellement populaire. « Il ne serait peut-être pas exagéré de dire », écrivait le 15 août 1907 un ancien ambassadeur, « que si l’Allemagne jouissait d’un régime démocratique, les incidents les plus fâcheux se seraient déjà produits. » « Le socialiste, dit de son côté M. Millioud, lutte contre le patron pour relever la condition du prolétaire, mais il s’entend fort bien avec eux pour briser la concurrence et asservir les marchés étrangers. »

Ces constatations sont exactes, mais on doit dire cependant qu’en général la guerre n’est pas déchaînée par les nations, auxquelles elle répugne, mais par des groupes qui représentent des intérêts particuliers. D’ailleurs qu’a-t-on fait jusqu’aujourd’hui pour entretenir les peuples dans les idées de paix et de tolérance internationales ? Rien, ou presque rien. Au contraire, chaque fois qu’interviennent leur gouvernement, c’est semble-t-il pour éveiller en eux les plus basses passions de haine. Les foules ne sont pas maîtresses d’elles-même ; c’est aux gouvernements de les éduquer et de les encadrer dans des institutions qui leur enlèvent leur caractère de foule.

4. Il y a lieu sérieusement de craindre qu’après la guerre, au lieu d’un régime de publicité et de libre discussion, nous n’entrions au contraire dans une phase où le secret sera la modalité de toutes les affaires : secret militaire, secret scientifique, secret politique. Chacun gardera pour lui ce qu’il aura appris ; chacun fera de l’espionnage, qu’il appellera pour s’en disculper du contre-espionnage ; chacun prendra l’initiative d’avantages qu’il dénommera de la défensive préventive.

5. On peut résumer ainsi les réformes à introduire pour étendre le principe démocratique aux affaires internationales. a) Organisation [1]

  1. La Revue, du 15 août 1907.