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ques, le socialisme intéresse l’internationalisme. C’est d’abord la combinaison en lui de différentes tendances nationales. Le vrai marxisme révolutionnaire est une synthèse de trois éléments : la philosophie dialectique allemande, la pratique révolutionnaire française, l’histoire de l’évolution économique anglaise. Et, suivant les circonstances, c’est l’une ou l’autre de ces tendances qui a prédominé. En Russie par exemple les socialistes se divisent en deux écoles : ceux qui veulent « parler allemand », c’est-à-dire ceux qui préconisent une lente organisation et un opportunisme réformiste, et ceux qui veulent parler français » c’est-à-dire préfèrent l’élan révolutionnaire des masses populaires décidant elles-mêmes de leurs destinées.

Autre fait à noter, les socialistes prétendent que tant que n’aura pas été résolu le problème social – équation de justice entre l’effort productif et sa rémunération – on n’aura trouvé aucun fondement réel et solide à l’association humaine et par conséquent à la solidarité générale. Les socialistes placent donc avant tout l’internationalisme dans la réalisation du problème social.

Mais la question internationale se pose encore d’une autre manière pour le socialisme. Pas de véritable socialisme à entrevoir sans socialisation internationale. Tous les socialistes collectivistes sont partisans du retour des biens à la communauté. C’est la socialisation des moyens de production, la répartition équitable entre tous du travail commun, et la distribution des objets de consommation, soit selon le travail de chacun, soit selon ses besoins. Or, pour les uns, la collectivité qu’ils envisagent est communale (Socialisme municipal, Sydney Webb et les Fabiens en Angleterre), pour les autres elle est nationale, pour d’autres encore elle est internationale. Des problèmes spéciaux se posent ici, qui n’ont guère été posés, encore moins résolus. S’il s’agit d’une collectivité nationale (étatisme), quels rapports nouveaux devra avoir l’État avec les autres États, du chef de ses fonctions économiques ? S’il s’agit au contraire d’une collectivité internationale, comment organiser celle-ci et quelles relations établir entre les dites fonctions économiques et les fonctions politiques ?

4. Le Socialisme et la Guerre. — Certes la guerre a été une dure épreuve pour le socialisme. Elle a divisé l’entente internationale, solidarisé davantage les sections nationales sur la base du groupement des pays belligérants. Le parti socialiste allemand et le parti socialiste français avaient d’un commun accord publié en 1913 un manifeste destiné à faire entendre la protestation de la classe ouvrière des deux pays contre les armements annoncés et contre les entreprises belliqueuses formulées de part et d’autre. Ils dénonçaient les agissements insensés des classes dirigeantes (Humanité du 1er mars 1913. « Revue socialiste » du 15 mars 1913). Les socialistes français étaient pacifistes et ne voulaient aucune agression. Ils niaient l’invasion subite, les