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gouvernement repose sur le principe devenu célèbre du « government of the people, by the people, for the people[1] ».

On distingue deux grandes doctrines en politique : la politique absolutiste et la politique libérale. La première ne reconnaît à l’individu d’autres droits que ceux que le pouvoir civil lui confère et lui constitue par sa volonté. La seconde reconnaît à l’individu des droits naturels, indépendants en soi du pouvoir de l’État et que celui-ci protège et garantit, mais qu’il ne fonde pas et qu’il peut encore moins supprimer.

Il existe deux types de démocratie : l’absolue construite d’une pièce par les théoriciens (Rousseau) ; la démocratie relative réalisée, qui tient compte de la relativité de la vie, des traditions, des nécessités pratiques. La première agit sur la seconde. Ce sont les idées de Rousseau qui ont bouleversé la vieille Europe et exercé sur les institutions du monde une énorme influence directe et indirecte. Elle affirme que la nation est une somme d’individus réunis par le contrat social, que tous les hommes sont également doués de raison et ont également droit au gouvernement des sociétés. Elle est la souveraineté illimitée et directe, inaliénable et imprescriptible du peuple. Cette souveraineté est basée sur le consentement libre et volontaire de tous les individus égaux, chacun d’eux étant considéré comme le centre et la mesure de toute chose. Elle n’existe, ne se manifeste et n’agit que dans l’assemblée de tous.

La démocratie classique repose sur trois principes fondamentaux : a) Principe égalitaire. Tous les individus étant égaux, toutes les volontés étant égales, tous les hommes ont le même droit et la tendance à l’égalité des conditions est la seule base rationnelle d’une société démocratique. b) Principe majoritaire. Pour savoir ce que veut cette société, il suffit de totaliser et de condenser les volontés individuelles égales, et l’expression démocratique de la volonté populaire, c’est la majorité numérique. c) Suffrage universel. Comme, pour trouver cette majorité, il est impossible de réunir en permanence la totalité des individus ou le peuple lui-même, il faut se contenter de réunir des délégués, et le seul procédé démocratique de délégation c’est le suffrage égalitaire de tous les individus[2]. Les corollaires déduits de ces principes ont été notamment le plébiscite, le référendum, la législation directe, la maxime que chaque député représente la nation entière, le mandat impératif, la rétribution du mandat,

  1. De Tocqueville, Histoire de la démocratie américaine. — Julien Luchaire, Les démocraties italiennes. — H. Pirenne, Anciennes démocraties des Pays-Bas. – A. Croiset, Les démocraties antiques. J. St. Mill, On liberty.
  2. Pour toute l’Europe, en se basant sur les chiffres des environs de 1905, on trouve sur une population de 408 millions, 108 millions hommes de plus de 21 ans, avec un total de 55 millions d’électeurs, soit 13 % de la population et la moitié des hommes majeurs. Le pourcentage des électeurs votants est de 72 %.