Page:Otlet - Problèmes internationaux et la guerre.djvu/397

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

trop tard pour la protéger ? Les Belges aujourd’hui raisonnent ainsi : La neutralité belge a été imposée dans l’intérêt de l’équilibre de l’Europe, lequel est solidaire de l’équilibre politique du monde entier. Il est donc rationnel que cette neutralité soit désormais garantie par tous les États, au moins par toutes les grandes puissances, comme c’était l’esprit des traités de 1838. L’Amérique, l’Italie, le Japon devenus grandes puissances depuis, devraient contresigner à l’avenir tous accords. À défaut de garanties générales et tout à fait sérieuses il faut dégager la Belgique de toute obligation de neutralité, car il est inique d’obliger un petit pays à préparer une défense éventuelle et théorique sur tous ses fronts, tandis que ses puissants voisins ont, eux, le droit de conclure des alliances défensives qui limitent d’avance les fronts à défendre. Ainsi posée, la question de la Belgique conduit directement à celle de l’organisation de la Société des nations, qui est la forme organisée de la garantie générale, et le nouveau droit international sort des sphères spéculatives pour entrer dans la réalité politique et juridique immédiate. Le problème de la neutralité de la Belgique influencera certainement celui de la Suisse et même des autres petits pays[1].

292.5. LE TERRITOIRE. — Le territoire d’un État est la partie du globe où cet État exerce sa souveraineté. Il est composé du sol, du sous-sol et de la superficie, de terres et d’eaux ; ces dernières comprenant les fleuves et cours d’eau, les lacs et les mers intérieures, la partie de la mer la plus rapprochée du rivage. D’une manière générale, les frontières d’un État coïncident avec les territoires qu’occupent ses nationaux, mais il y a à cela de nombreuses exceptions. Ainsi, avec les facilités de communication, se sont développées les possessions coloniales.

L’étude du territoire en lui-même soulève diverses questions : quels ont été au cours de l’histoire les facteurs de la formation territoriale des États ? La grandeur du territoire est-elle en proportion de la puissance des États et de la prospérité de leurs habitants ? Quelle est la valeur comparée de divers territoires au point de vue physique et économique : richesses naturelles, habitabilité, accessibilité, etc. ? Quelles sont les fictions en vertu desquelles le territoire peut être considéré comme prolongé : exemples, territorialité accordée aux légations et aux hôtels diplomatiques ; pavillon faisant considérer le navire comme une extension de territoire ? Un même territoire peut-il être soumis à plusieurs souverainetés (co-souveraineté, souverainetés hiérarchisées) ? Quels sont les procédés de l’acquisition et de la perte des territoires (Question de la conquête et des annexions traitée ailleurs) ? Quelles transformations territoriales apportera la guerre ? — Nous

  1. La neutralité de la Suisse n’est pas garantie par l’Italie, son proche voisin, pour la même raison que cet État n’existait pas en 1815.