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vit la politique. Cette tendance s’accompagne de cette autre que l’administration est organisée comme un ensemble de services publics destinés à satisfaire non les intérêts de l’autorité, mais ceux du peuple.

c) Les bases de la politique ont changé au cours des siècles. Pour l’époque moderne il n’y a plus de droits légitimes des souverains, plus de jugement de Dieu, plus d’autorité religieuse, plus de raison d’État, plus d’équilibre. Il ne reste d’autre base possible que la force, le sentiment national ou l’organisation conforme à la liberté et à l’égalité, sanctionnée par des institutions juridiques internationales.

d) Le caractère positif, objectif, des méthodes politiques, n’implique pas nécessairement une préférence pour une politique nationale, réaliste (Realpolitik), plutôt que pour une politique généreuse et idéaliste. « Ce n’est pas en voulant avant tout « faire des affaires », qu’on élève une nation saine. La fonction essentielle de l’État n’est pas de claculer des prix de revient. Au-dessus des questions d’argent, il y a pour l’État aussi bien que pour l’homme des intérêts supérieurs à cultiver. La politique est à l’État ce que la religion ou la philosophie est à l’individu. Inférieure, elle l’abaisse ; supérieure, elle l’élève. À l’État de donner aux citoyens qu’il représente et synthétise l’exemple du désintéressement et de l’élévation des vues ». (Henri Chenevard). Toutefois une distinction s’impose entre une politique purement idéale et verbale et une politique de réalisation. La société ne vit pas pour faire acte de philosophie ou de science. Tout ce qui ne passe pas dans les faits est politiquement inexistant. Ceux, parmi les Latins surtout, qui se figurent qu’un mot heureux, un discours impressionnant, peuvent tenir lieu d’actes positifs, conduiraient leurs peuples, s’ils triomphaient, à la stagnation, prélude de la décadence.

291.2. ÉVOLUTION DES DOCTRINES POLITIQUES.. — La science politique traite de la formation, de l’organisation et des fonctions de l’État. Elle est inconnue dans l’antiquité orientale, où règne le despotisme absolu d’un homme ou d’une caste, qui représente la divinité. Seule la Chine, avec Confucius et Mencius, s’inquiète des devoirs du gouvernement. Elle apparaît en Grèce. Platon expose le plan d’une république idéale (la République, les Lois) ; Aristote (la Politique), appliquant la méthode d’observation, analyse les différentes formes de gouvernement, la notion de souveraineté, les droits des hommes libres, sans séparer encore la politique de la morale. Au moyen âge les docteurs de l’Église, précédés déjà par saint Augustin (La cité de Dieu) et trouvant leur haute expression dans saint Thomas d’Aquin, déclarent que le pouvoir civil vient de Dieu, mais par l’intermédiaire du peuple en qui Dieu l’a mis et qu’il communique aux chefs de l’État. En cas de conflit, ils placent la théologie au-dessus de la politique. Au XIVme siècle le pouvoir civique, avec Ockam, avec Philippe le Bel, revendique son indépendance en se réclamant lui