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personne du droit international et membre de la Société des nations ; il déterminera ses relations obligatoires avec les autres États et avec l’Union des États. Cette notion reposera sur la conception moderne que l’État est l’entité chargée de réaliser certains services publics au profit de ses membres, que sa souveraineté est limitée par ses obligations inéluctables envers une Société des nations chargée, elle, d’assurer la coexistence pacifique des États.

c) Les États seront liés entre eux non seulement par les traités particuliers qu’ils auront librement consentis, mais aussi par une loi mondiale, s’imposant également à tous et aux obligations de laquelle ils ne pourront se soustraire. Cette loi sera faite par un Congrès, une Constituante ou un Parlement à sessions périodiques ; elle sera décidée à des majorités déterminés et sera essentiellement revisable. Les États ne pourront rompre ces traités arbitrairement sans s’exposer à des sanctions. Les traités viendront périodiquement à échéance et pourront alors être prolongés. Un organisme sera créé pour centraliser les ratifications des traités, les publier et en conserver les archives.

d) Le droit ne s’occupera pas seulement des États, mais aussi des peuples, des nationalités, seules réalités vivantes. Il leur fera dans son organisation la place qui leur revient. Il ne sera plus ainsi un protocole de princes, un guide des ambitions politiques, ni un processus pour régulariser des conquêtes, annoncer la guerre et la conduire avec gloire, honneur et profit.

e) Le droit nouveau fera sienne la triple division du droit, d’après son objet, en droit régissant des populations, droit régissant des territoires, droit régissant des catégories d’intérêts et de relations. Il embrassera la vie de la collectivité humaine tout entière dans ses divers domaines, biologique, ethnique, économique, intellectuel. Il procurera la solide armature nécessaire au maintien et à la création des institutions de tous ces ordres que nous avons rappelés ou proposés au cours de cet ouvrage.

f) Le droit fera notamment une large place aux questions sociales qui à leur stade évolué sont devenues des questions internationales. « Ce qui caractérise la phase actuelle du droit c’est sa socialisation. Le droit de jadis ne considérait dans une société humaine qu’une fraction de l’ensemble, les classes supérieures, noblesse, clergé, bourgeoisie, le groupe des possidentes. L’immense masse des ouvriers, travailleurs du muscle, voire travailleurs du cerveau, ne ramassait que les miettes de la table juridique. Désormais cette dernière, la plèbe oubliée ou dédaignée d’autrefois, est considérée à l’égal des autres dans l’œuvre législative ; celle-ci vise la société entière, elle s’est « socialisée », — le mot n’existait pas plus que la chose ; l’un et l’autre maintenant triomphent » (Edmond Picard). Le droit fera une part non moindre au droit économique.