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Les territoires valent par leur richesse. Or, deux sortes de richesses sont à considérer : les unes naturelles, les autres nées d’efforts humains. a) Les richesses naturelles sont inégalement réparties de par la terre. Le globe n’a pas été soumis dans sa constitution à des causes dont la finalité serait les hommes ; encore moins les hommes tels qu’ils se trouvent être groupés en nations et en États en l’an de grâce tel ou tel. Il n’y a aucune corrélation harmonique et préétablie entre la vie de l’univers physique et celle des petits microcosmes conscients que sont les hommes. Ici la matière minérale, charbon ou pétrole a été concentrée dans de grands bassins, tandis qu’ailleurs l’écorce terrestre est minéralement stérile. Là, dans les montagnes, les chutes d’eau et les rivières étagées offrent la puissance hydraulique, tandis que les pays de grandes plaines en sont privés. Le climat est tempéré, habitable, agréable, stimulant dans telle zone, torride ou glacial dans les autres. Les hommes ont occupé les territoires, ils en ont fait leur propriété tantôt commune, tantôt divise. Ils ont élevé des barrières autour d’eux. Ils ont monopolisé ainsi les richesses naturelles. Beaucoup, par leur travail, les ont mises en valeur, les ont fait entrer dans la circulation générale. Certains n’en ont rien su faire, tout en défendant aux autres d’y pénétrer et d’en tirer partie. Quel est le fondement donné à leur droit. L’occupation, l’invention, la conquête, est-ce suffisant ? Dans une première période d’abondance, oui. Mais à partir du jour où le globe s’est couvert de populations nombreuses et développées, l’économie dans l’usage des biens et leur utilisation maximum est devenue une nécessité. Un droit nouveau doit remplacer alors le droit ancien pour préparer et organiser une nouvelle répartition. La « question sociale » a posé le problème à l’intérieur ; « la question internationale » pose le même problème à l’extérieur entre peuples. Notre époque a poursuivi une certaine socialisation de biens. Le régime féodal est tombé en 1789, l’égalité de droit a été proclamée, la mainmorte prohibée, le morcellement de la propriété facilité, l’expropriation pour cause d’utilité publique instaurée ; l’accumulation privée a été tempérée par les impôts sur le revenu, le capital et les successions, par la participation aux bénéfices, l’élévation de la part faite aux travailleurs, par les charges qu’impose le système d’assurance et de prévoyance sociale. La grande majorité reconnaît aujourd’hui la justice de ces mesures. Les socialistes et les collectivistes, eux, vont encore plus loin ; ils demandent la socialisation des moyens de production et proposent des moyens d’expropriation des droits acquis moyennant compensation. La « question internationale » c’est tout cela, transporté dans la sphère des compétitions de pays en pays. Il s’agit, si l’on peut employer cette expression, de socialiser le droit international, comme on a socialisé le droit privé et de prendre à l’égard des richesses naturelles des mesures de « mondialisation ». — b) Par l’accumulation des efforts de toute