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s’est révoltée et un tollé s’est élevé dans le monde contre ces abominations.

Aussi d’un mal naîtra un bien. L’opinion publique mondiale puisera dans les événements des éléments de force, d’unité et d’extension et après la guerre elle voudra des actes de réaction, non pas la suppression mais le renforcement du droit international. C’est à tort que l’on crie à la faillite du droit international. Les protestations provoquées par les événements suffiraient à elles seules à sauver le droit. On ne saurait conclure à la faillite du droit pénal parce qu’il y a des criminels qui le méconnaissent. On ne peut conclure à celle du droit international parce que 20 à 30 %, de ce droit est tombé en caducité. Au cours de cette guerre les belligérants eux-mêmes ont fait acte de reconnaissance du droit international à l’égard des neutres. L’Allemagne a fait des excuses répétées à la Hollande, à la Suisse et à la Suède pour navires torpillés et bombardement d’avions. La France a renvoyé en Suisse un aviateur prisonnier qui s’était évadé malgré sa parole. L’Allemagne a proposé aux États-Unis de faire trancher le cas de l’Hespérian par la Cour d’arbitrage. L’Angleterre a proposé à l’Allemagne un conseil d’enquête sur les attaques respectives de sous-marins. Les belligérants ont aussi tous publié des livres officiels relatant et dénonçant les infractions aux droits des gens constatées par les commissions officielles qu’ils ont nommées[1]. C’est donc qu’ils entendent se réclamer du droit international. À la vérité, de tous ces faits c’est une conclusion toute autre qui s’impose. Puisqu’il est impossible d’humaniser la guerre, il faut organiser son abolition pure et simple. Et cela est urgent si l’on veut écarter une future extermination des êtres humains.

285. L’Adaptation du Droit international.

1. Nécessité de l’adaptation. — Le droit est en constante évolution comme la réalité sociale à laquelle il s’applique. Quand il se crée dans la loi, la convention, ou le premier acte qui deviendra l’usage, il est l’expression d’un équilibre des forces en présence. Mais à peine existe-t-il que l’état des forces est déjà modifié, soit que la réalité matérielle (circonstances de fait, intérêts, utilité) n’est plus la même, soit que la réalité intellectuelle (aspirations, désirs, concepts) ait changé. L’équilibre qu’il consacre étant ainsi constamment rompu, il importe que le droit aussi puisse subir les modifications corrélatives.

  1. On a proposé la création de Commissions d’enquête internationale, destinées à vérifier les faits allégués (Projet des professeurs Mercier, Sauser-Hall et Simons et du « Nederlandsche Anti-Oorlog Raad »). Les évêques belges ont demandé l’enquête contradictoire à leurs collègues allemands. De telles institutions devraient avoir une organisation permanente et les infractions devraient pouvoir être dénoncées par elles en cours de guerre à la Cour internationale, au même titre que les conflits, causes de guerre.