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leur cause était vaincue, qu’adviendrait-il de l’Europe ? Que] sort lui préparerait l’influence de l’Angleterre protestante, de la Russie schismatique, de la France révolutionnaire ? Des changements sont survenus ensuite dans beaucoup d’appréciations des catholiques neutres[1].

7. Le clergé s’est montré, chez tous les belligérants, nationaliste et patriote. En France, il avait péri sur les champs de bataille, au commencement d’octobre, 3500 prêtres et 2300 séminaristes. En Belgique, le cardinal-archevêque D. Mercier a encouru les rigueurs allemandes pour sa lettre pastorale énergique[2].

8. Le fait que Dieu permettait cette guerre abominable, que la Belgique, la Pologne, la Galicie, pays très catholiques en avaient été les premières victimes, que les prières des fidèles et l’intervention du pape ont été sans résultat après plus d’un an de guerre, que chaque belligérant a successivement proclamé avoir avec lui la divinité, que les atrocités allemandes ont été commises par des soldats allemands portant sur leur ceinturon : « Gott mit uns ».

Tous ces faits ont posé le problème religieux devant des millions de consciences. Ils accroissent l’irréligion chez beaucoup. Dieu, disent les mécréants, aurait dû empêcher la catastrophe actuelle, forcer les hommes à trouver par voie pacifique la solution de leurs conflits. Il eut suffi, par exemple, de subtiliser les explosifs et les armes à feu. Ne l’ayant pas fait, c’est qu’il n’est pas le Dieu juste et bon et tout-puissant, c’est qu’il ne s’occupe pas des choses humaines, ou qu’elles sont hors de son action, ou qu’il n’est pas du tout la personnalité douée des attributs que les hommes lui supposent en se le représentant à leur propre image. Chez les neutres les hommes d’église vont aux fêtes nationales remercier Dieu d’avoir protégé leur pays. En quoi, par exemple, la Hollande, pays protestant et catholique, la

  1. Mgr. Batifol, À un neutre catholique, « Pages actuelles », 1914-1915, n° 38. — Maurice de Sorgues, Les catholiques espagnols et la guerre, « Pages actuelles », 1914-1915, n° 36. — Comité catholique de propagande française à l’étranger : « La guerre allemande et le catholicisme » (avec album de documents graphiques.) L’ouvrage du Dr Rosenberg. Der Krieg und der Katholizismus, est une réponse à cet ouvrage. Le Comité français a répliqué par « L’Allemagne et les alliés devant la conscience chrétienne » — R. Johannet, La conversion d’un catholique germanophile, « Lettre ouverte » de M. Emile Prüm. chef du parti catholique luxembourgeois, à M. Mathias Erzberger, député du centre, — Comte Bégouen, Les catholiques allemands jadis et aujourd’hui. — Balmes, Les catholiques espagnols et la guerre. — Comte Bégouen, La guerre actuelle devant la conscience catholique. — Mgr. Henri Chapon, La France et l’Allemagne devant la doctrine chrétienne de la guerre.
  2. Geoffroy de Grandmaison, Les aumôniers militaires, « Pages actuelles », 1914-1915, n° 41. — Mgr. L. Lacroix, Le clergé et la guerre de 1914. — René Gaell, Les soutanes sous la mitraille. — Actes d’héroïsme, de bravoure et de dévouement, d’abnégation, de charité et de loyauté du clergé et des catholiques français et belges pendant la guerre, recueillis par Gabriel Langlois et présentés par Mgr. Herscher.