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Prusse, l’État possède usines, fonderies, vignobles, fabriques de porcelaines, le tout donnant des revenus considérables et employant plus de 100,000 ouvriers. En Italie, l’État a repris récemment le monopole des assurances sur la vie. La Nouvelle-Zélande préfère exploiter l’assurance-accidant et l’assurance-incendie. La Russie et la Suisse exercent les monopoles de l’alcool. La France a organisé les grands monopoles financiers du tabac, des allumettes, de la poudre ; l’État y possède aussi d’ancienne date quelques industries sans grande importance : porcelaines de Sèvres, tapis des Gobelins, gravures du Louvre (calcographie), Imprimerie nationale, haras, établissements thermaux dans des villes d’eaux, etc. Il faut prévoir que les monopoles vont s’accroître en nombre sous la double influence du mouvement socialiste d’une part et des nécessités budgétaires devant lesquelles la guerre aura placé tous les pays. Un gros problème économique surgit a l’horizon. Qu’adviendra-t-il des relations économiques de l’État, détenteur de monopoles publics, avec les trusts libres ? Les États ne devront-ils pas entrer dans certains trusts mondiaux pour les industries qu’ils auraient monopolisées chez eux, ou dont ils posséderaient d’importants établissements ? Ne peut-on même entrevoir que les États devront, en certains cas, agir entre eux pour leurs monopoles, comme le font les trusts nationaux ? Qu’adviendrait-il par exemple, si les monopoles des assurances par l’État s’établissaient dans tous les pays ? Les États ne pourraient se défendre ici « en fermant simplement la frontière » aux contrats d’assurances étrangers. Ils devraient donc ou bien défendre absolument ces sortes de contrats conclus avec un État étranger, ou bien faire entre eux des ententes pour les primes, afin d’éviter de se concurrencer les uns les autres. Il resterait en tout cas à déterminer le sort des assurances relatives aux étrangers résidant dans le pays.

Les faits suivants sont symptomatiques. En Prusse l’État, consommateur de charbon pour ses chemins de fer, a essayé de se défendre contre l’omnipotence du Syndicat rhénan westphalien en cherchant, mais vainement, à acheter en 1906 les actions de la mine Hiberia. Il contrôle seulement 25 % des houillères de Haute-Silésie et domine les mines de Saarbrücken, mais la production totale de ses mines, en 1908, n’était que de 1 million et celle du syndicat plus de 64 millions. À propos de la potasse des difficultés diplomatiques sont nées entre l’Amérique et l’Allemagne. Les Américains avaient découvert des mines de potasse en Alsace. La Prusse institua un syndicat légal obligatoire de potasse où durent entrer les Américains. Les capitalistes américains résistèrent avant d’y consentir. Le gouvernement russe a annoncé l’intention de prendre le monopole de raffinage du platine et d’interdire d’une manière absolue l’exportation du minerai. Ainsi il deviendrait à son tour maître du marché d’un produit que les circons-