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les transactions quotidiennes à la Bourse de New-York dépassent 175 millions de francs.

2. L’internationalisation du capital. — L’échange des capitaux marque la dernière étape de l’évolution de l’échange international. C’est seulement à une époque rapprochée de nous, le milieu du XIXme siècle, qu’il a pris un grand développement et que l’on doit compter par milliards et dizaines de milliards les capitaux exportés par certains pays étrangers. Aujourd’hui presque tous les pays sont réciproquement créanciers et débiteurs les uns des autres. L’Angleterre, la France, la Belgique, l’Allemagne sont des pays créanciers ; L’Espagne, la Turquie, la Russie, l’Autriche, le Brésil, la République Argentine, sont des pays débiteurs.

Le capital s’affirme essentiellement mobile. Il s’offre à qui le rémunère davantage. Il a pris la forme des grandes sociétés anonymes, dont les titres, actions et obligations le représentent. La nationalité de ces sociétés n’est qu’une pure fiction, puisque les titres étant au porteur circulent dans tous les pays et sont cotés dans toutes les grandes bourses. Un ordre télégraphique, en opérant un simple transfert de valeurs mobilières, suffit pour dénationaliser une entreprise, sans qu’en apparence rien ne soit changé, ni se trouve révélé à personne.

Le placement des capitaux à l’étranger prend des formes multiples : achats de valeurs mobilières à l’étranger, inscriptions dans les bourses nationales des valeurs étrangères ; entreprises industrielles nées à l’étranger souvent des filiales ; dépôt dans des banques étrangères ; prêts directs à l’étranger, États et particuliers. Les valeurs cotées à la Bourse de Paris au 1er janvier 1911 représentaient une valeur de 141 milliards de francs, dont 65 milliards de titres étrangers ; les deux tiers appartiennent à des français. En 1880 les dépôts dans les banques suisses s’élèvent à 472 millions : en 1909 à 1655 millions, la plus grosse part de cette augmentation venant certainement des dépôts étrangers.

Londres, Paris, New-York, Berlin sont des réservoirs mondiaux du capital. Leur influence est universelle comme grands marchés financiers régulateurs.

Depuis longtemps les États sont intervenus dans cette internationalisation des capitaux. Certains d’entre eux, poursuivant des vues intéressées, ont voulu contraindre les étrangers à leur emprunter de l’argent. Le cas des emprunts chinois est typique.  Il s’est renouvelé pendant la guerre avec certains neutres, mais dans un intérêt militaire évident. Les États ont aussi entouré d’une protection spéciale les capitaux nationaux à l’étranger. Les démêlés que l’Europe a eus à ce sujet avec les Républiques centrales et sud américaines sont nombreux : elle a cherché à contraindre les États étrangers à s’acquitter soit de leurs propres dettes, soit de celles de leurs natio-