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autres. Il considère avant tout l’intérêt, l’idéal, les besoins de l’humanité et du monde en eux-mêmes, et comme spécifiquement distincts de la somme des intérêts et des besoins des entités politiques existantes.

La tâche essentielle du temps présent est la combinaison du nationalisme et de l’internationalisme pour créer une vie universelle plus humaine, plus juste et plus pacifique, à la fois libre et organisée.

2. Distinction et terminologie. — L’emploi des mots « internationalisme » et « international » donne lieu à quelques observations. Il vaudrait mieux peut-être écarter le mot internationalisme et le remplacer par le mot « internationalité » ; la terminaison isme transforme en une sorte de parti pris « politico-métaphysique » ce qu’il faut simplement constater comme un fait, comme un moment de l’histoire des sociétés humaines sur la terre. Le mot « internation » a été employé en anglais comme équivalent de la « communauté internationale ». Le mot supernational » ou plus brièvement « surnational » serait peut-être le mieux choisi des termes. L’Humanité, le tout, est en effet distincte des nations, des parties, de la même manière qu’un État est distinct des communes qui le composent. Il y a des relations directes d’un citoyen avec l’État sans passer par l’intermédiaire de la commune ; il y a des relations directes de l’homme avec la communauté humaine. Le terme « national » a été créé pour désigner la combinaison spéciale formée par l’État et non pas le terme « intercommunal » dans le sens de « supercommunal ». Il faudrait donc écarter le mot international comme on a écarté intercommunal ; ou, mieux, réserver le premier mot aux relations entre deux ou plusieurs États, comme le second s’applique aux relations entre deux ou plusieurs communes ; recourir au mot supernational en le rangeant dans la même classe que les mots « universel », « humanitaire », « mondial ». Le terme « mondial » est le synonyme ordinaire d’international. Mais strictement il conviendrait de qualifier mondial ce qui convient au même titre à toutes les nations, supernational ce qui leur est supérieur et international ce qui s’applique à deux ou à plusieurs nations.

« Il ne faut pas, dit Ludwig Stein, confondre internationalisme et cosmopolitisme. La théorie des libres penseurs et des premiers romantiques se nommait cosmopolitisme. L’antithèse qu’a formée le développement historique de l’Europe du XIXme siècle se nomme nationalisme. — La synthèse qui s’efforcent de réaliser les États saturés de nationalisme se nomme internationalisme. Le cosmopolitisme est synonyme d’intégration du genre humain, le nationalisme en a revanche exige la distribution des races et des types selon les peuples et les nations ; l’internationalisme crée une communauté humaine sur la base du fédéralisme, c’est-à-dire du respect des nationalités et des autorités ».